dimanche 6 juin 2010

Philosophie n°106 : l'Individu

Stéphane Chauvier, François Schmitz, Vincent Descombes, Julien Rabachou, Frédéric Worms, Marc Pavlopoulos



Les Editions de minuit
Juin 2010
Prix : 10 €

Ce numéro porte sur la question de l'individu. Or loin d'être univoque, elle a été déployée dans des registres problématiques distincts.
La notion d'individualité concerne tout d'abord tout étant en général et relève de l'ontologie formelle ou des ontologies mondaines. Au sein d'un domaine spécifique - domaine idéal des nombres entiers, champ des objets intra-mondains en général, domaine réal des objets de temps, des choses étendues, matérielles, culturelles, des êtres animés, des personnes, etc. –, on se demande quel est le principe d'individuation qui rend compte de la singularité des étants de ce domaine : qu'est-ce qui caractérise l'individualité d'un nombre entier au sein de leur suite indéfinie ? celle d'un objet intra-mondain par rapport à tout autre ? qu'est-ce qui distingue de toute autre une chose spatiale dans le champ sensible, ou un objet culturel dans l'environnement ? La question se subdivise donc en deux, selon que l'on considère la singularité des idéalités formelles d'un champ de pensée, ou celle des objets intra-mondains : la première tâche de dégager les principes purement logiques d'individuation d'un objet de pure pensée, la seconde, de thématiser les principes d'individuation réale des objets mondains (temps, espace, matérialité ou causalité, signification culturelle, système de renvois, etc.). Dans cette perspective, Stéphane Chauvier tente de distinguer deux sens de l'individualité (hénade et monade) corrélatifs à deux modes d'accès aux choses – l'un qui le considère comme une singularisation au sein d'une espèce, l'autre comme une singularité absolue et close sur soi. Et François Schmitz analyse l'argument célèbre de Ramsey discuté par Russell, relativement à la question de savoir si les objets intra-mondains se partagent ou non en deux classes – celle des particuliers et celle des universaux.
La question se complique lorsqu'on la restreint au domaine de l'individualité humaine : est-il possible de penser la singularité d'un individu humain à partir des instruments conceptuels qui ont permis de caractériser celle de l'étant en général (catégories et principes d'individuation), ou bien l'individualité humaine est-elle sui generis et requiert-elle une conceptualité nouvelle ? Ainsi, Julien Rabachou examine la pertinence de modèles ontologiques traditionnels pour penser l'individu humain. Et, partant de la thèse heideggerienne qui distingue l'identité ontologique d'un étant quelconque (Selbigkeit) et l'ipséité d'un être humain (Selbstheit) – alors que l'identité à soi-même d'une chose de la nature est simplement ce qui fait d'elle cette chose, l'ipséité relève de la manière d'être vis-à-vis de soi-même ou de choisir entre être soi-même ou non –, Vincent Descombes s'attache à dégager la confusion grammaticale qui grève implicitement l'analyse heideggerienne : la confusion entre le quis et le quid, l'identification d'un individu et la caractérisation de ses actes. De même, Frédéric Worms réinterroge le rapport entre individu et relation, en se demandant si les relations interindividuelles sont ou non constitutives de l'individualité – ce qui conduit de l'ontologie à l'éthique. Enfin, Marc Pavlopoulos et Andy Hamilton repensent l'individuation humaine à partir de l'expérience interne : quel type d'expérience me permet d'avoir accès à mon Soi et de fixer mon ipséité ?
D. P.

Sommaire

Stéphane Chauvier
L'unique en son genre

François Schmitz
Ramsey : sur la distinction entre particuliers et universaux (1925)

Vincent Descombes
La question de l'individualité humaine

Julien Rabachou
Repenser l’ontologie de l’individu à partir d’un modèle pratique

Frédéric Worms
Les relations entre individus comme fait primitif :
de l’ontologie à l’éthique

Marc Pavlopoulos
« Je » est-il une institution ?

Notes de lecture

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