mardi 24 mai 2022

Grégori Jean : Les puissances de l’apparaître. Études sur M. Henry, R. Barbaras, et la phénoménologie contemporaine

Association Internationale de phénoménologie - Janvier 2022 - Mémoires des Annales de phénoménologie


Cet ouvrage se présente d’abord comme une petite étude historique destinée à éprouver une hypothèse précise : dans la séquence qui relie l’œuvre de Michel Henry à celle, toujours en devenir, de Renaud Barbaras, se jouerait beaucoup moins l’introduction du concept de « vie » en phénoménologie qu’une interrogation commune sur ce qu’ « apparaître » veut dire — et ceci sur le fondement d’un diagnostic commun. Dans l’ensemble de la tradition phénoménologique en effet, et en raison d’une fidélité résiduelle à Kant et aux dogmes qu’il avait cru pouvoir fixer à toute philosophie transcendantale, l’apparaître n’aurait jamais été appréhendé qu’au prisme de son impuissance constitutive, comme ce qui dès lors n’assure le dévoilement des étants que pour autant qu’il ne les fait pas être. En admettant qu’une telle impuissance n’appartienne pourtant pas à l’essence de toute phénoménalité, en admettant par conséquent qu’un avenir possible de la phénoménologie réside dans sa capacité à renverser les dogmes kantiens pour se saisir d’une certaine puissance de l’apparaître, le problème qui se pose est double : 1/ D’une part, quel est le sens de la grande alternative à laquelle un tel renversement finit ici par aboutir — la puissance d’une vie arrachée au monde et capable d’engendrer son propre agir d’un côté, la surpuissance ontogénétique d’un monde dès lors assimilé à une Physis de l’autre ? 2/ D’autre part — et à supposer que nous parvenions, comme nous y invite l’évolution récente de la pensée barbarassienne, à nous arracher définitivement au kantisme pour nous saisir correctement du sens et des enjeux de cette greffe ontogénétique de l’apparaître —, dans quelle mesure ne nous faudrait-il pas reconduire une telle alternative à l’unité d’un dévoilement et d’un engendrement qui, dès lors, nous permettrait de nous saisir de la phénoménologie comme d’un « monisme » indissociablement phénoménologique et ontologique ? C’est parce qu’il affronte de telles questions que cet ouvrage n’est peut-être pas seulement une contribution à l’histoire de la phénoménologie — mais aussi une réflexion quant aux nouvelles voies philosophiques qui s’ouvrent à elle.

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