vendredi 19 janvier 2024

Marc Goldschmit : L'effraction esthétique. L'écriture de l'art dans le discours philosophique

 Kimé - Janvier 2024


Après les Grecs, l’art a disparu pendant plusieurs siècles de la philosophie. Il n’est revenu que beaucoup plus tard, au XVIIIe siècle, sous forme de considérations ou de théories la plupart du temps esthétiques. Ce retour du discours philosophique à l’art a été contemporain de la naissance de l’esthétique, et de la crise moderne ouverte par Kant : celle de la scission entre l’être du sujet et sa pensée (sa conscience). Contrairement aux apparences, le discours esthétique et philosophique sur l’art n’a pas d’abord constitué une discipline régionale et secondaire, qui s’occuperait d’une forme de connaissance mimétique de la réalité, et s’intéresserait aux effets subjectifs de l’art sur la sensibilité. La philosophie a plutôt été hantée par l’art, dès la naissance de l’esthétique, mais plus encore à partir de la réponse romantique et idéaliste à la crise de la modernité. La philosophie a en effet cherché dans l’art la possibilité de résoudre la séparation entre le sujet et l’absolu, et de réconcilier la liberté humaine et la Nature. Mais elle a en même temps rencontré son autre : l’art ne tient pas de discours, et rend sensible la présence de l’étranger, en brisant la totalité du savoir pour s’ouvrir aux différences. Ce livre cherche les traces de l’effraction esthétique de l’art, dans le discours philosophique, en lisant à rebours les philosophes de la première et de la seconde modernité (Kant et Nietzsche), ceux de la dernière modernité (Benjamin, Adorno), ceux d’après la fin de la modernité (Merleau-Ponty, Foucault, Derrida), et de la postmodernité (Lyotard, Rancière). Comment ces philosophes ont-ils laissé s’inscrire, parfois à leur insu ou à leur corps défendant, l’écriture moderne de l’art, la césure, la fragmentation, le morcellement venus de l’Autre, de l’inconnu, de l’inconscient ? Comment l’effraction esthétique atteint-elle la sensibilité et la pensée, jusque dans leurs conditions de possibilité et leurs limites ?

Marc Goldschmit est professeur agrégé de philosophie, Habilité à diriger des recherches, ancien Président et Directeur du Collège International de Philosophie. Il a publié : La vie sans appui. Penser à la limite de la théologie et de la religion (Kimé, 2023), La littérature, l’autre métaphysique (Manucius, 2020), Sous la peau du langage. L’avenir de la pensée de l’écriture (Kimé, 2020), L’opéra sans rédemption ou Éros musicien (Aedam Musicae, 2017), L’hypothèse du Marrane (Du Félin, 2014), L'écriture du messianique. La philosophie secrète de Walter Benjamin (Hermann, 2010), Jacques Derrida, une introduction (Agora-Pocket, 2003). Il a dirigé : Jacques Derrida, la philosophie hors de ses gonds (T.E.R., 2017), et co-dirigé : Shakespeare et les philosophes (avec Isabelle Alfandary, Manucius, 2023), L’énigme Nietzsche (avec Isabelle Alfandary, Manucius, 2019), Penser au cinéma (avec Éric Marty, Hermann, 2015). À paraître : Adorno et la scène philosophique. Dialectique et Métaphysique (direction de l’ouvrage, PUN, 2024), L’histoire extraordinaire de l’ours philosophe et de l’oiseau musicien, conte pour enfants illustré par Cécile Deglain (L’initiale, 2024).

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