Et si la fin des temps découlait précisément du recours abusif à la notion d’ « apocalypse » pour expliquer toutes nos angoisses ? Car c’est bien plutôt à la paralysie de la pensée qu’à la prise de conscience qu’aboutit ce sempiternel discours sur la fin du monde. L’effet en est décuplé dans un contexte où prolifèrent les instruments de mesure et de prédiction. Impossible d’ignorer ce qui nous menace depuis notre taux de cholestérol jusqu’à la fonte de la calotte glaciaire.
Dans l’univers technoscientifique qui est le nôtre, il n’est désormais presque aucun domaine, presque aucune réalité qui ne soit affligée d’un expert ou d’un spécialiste, comme une petite chose malade ou mal fichue. Une telle situation engendre un état d’hypocondrie cognitive – qui engendre à son tour une paralysie de la décision et de l’action : l’homme actuel s’en trouve affecté comme nul autre type d’hommes avant lui. Parler de Fin des Temps à l’homme d’un tel monde, c’est non seulement vouloir le clouer dans son lit, mais le plonger dans le coma. Ces impasses sont typiquement modernes et post-modernes, que ce soit dans l’excès d’ « ignorance » ou dans l’excès de « savoirs ». Il est donc plus que temps de rendre son sens réel et profond au mot « apocalypse » : révélation, dévoilement.
Pour cela, tentons un dialogue audacieux entre deux grands esprits de notre temps : René Girard (1923-2015), philosophe français, et Leonardo Castellani (1899-1981), grand théologien argentin . Tous deux sont investis de l’étonnement créateur sans lequel aucune vérité n’émerge, tous deux sont réalistes, profondément psychologues et grands lecteurs. C’est au niveau le plus spirituel et le plus caché de l’ apocalypse qu’ils nous mèneront.
Érick Audouard est écrivain, poète et traducteur. Il a vécu en Argentine et a publiéFragments de Trébizonde aux éditions Gallimard. Grâce à lui, Leonardo Castellani, immense écrivain argentin, a été présenté et traduit en français pour la première fois : Le Verbe dans le sang (Pierre-Guillaume de Roux, 2017).
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