Hermann - Mars 2025
Pendant l’année universitaire 1942-1943, alors que le monde est en guerre, le philosophe Heidegger donne à Fribourg des cours sur le philosophe présocratique Parménide. Ces cours ont été publiés par la suite dans le tome 54 de ses œuvres complètes, sous le titre Parmenide. Heidegger y répète que nous ne pouvons pas commencer à penser sans revenir à l’expérience grecque de la pensée. Mais, s’il est vrai que nous n’avons toujours pas commencé à penser, depuis 1942, ni même lu Parmenide pour la plupart d’entre nous, comment pouvons-nous continuer à entendre, comprendre, penser ce que Heidegger affirme à propos de la pensée ?
Bien que Heidegger en soit pour ainsi dire le « personnage principal », ce livre n’est pas une étude de plus pour entrer dans sa philosophie, pour la critiquer ou pour la dépasser. Le Nachdenker, en allemand « celui qui pense ou qui réfléchit », est le récit d’une expérience de lecture singulière. Le Parmenide de Heidegger installe son lecteur dans la position réconfortante d’un Nachdenker. Mais, l’ayant installé dans cette position, lui donnant le plaisir rare de revenir en pensée vers le sens des mots, il le conduit du même coup à repousser les boniments qu’il tente par ailleurs de lui faire avaler.
Philippe Eon vit et travaille à Paris. Il construit depuis des années une réflexion philosophique qui commence toujours par écouter ce que le langage nous laisse dire et nous fait dire. Cette approche a donné lieu à des ouvrages sur les manières de dire la politique dans le secteur de l’énergie ou face au changement climatique. Elle met en évidence ce que l’auteur nomme les éléments d’une « philosophie seconde » dans Fini pas Fini (PUL, 2023). Elle fait de la lecture le moment essentiel d’une attention philosophique à tout ce qui peut aujourd’hui nous être dit.
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