PUF - Août 2021
Le droit se structurait autour de découpages fondateurs ayant pour fondement une répartition spatiale (droit interne/droit international, espace public/espace privé par exemple). Or le numérique substitue à ces divisions spatiales porteuses de légalité une nouvelle division plus radicale qui oppose la totalité de l'espace d'une part et une nouvelle écriture du droit fondée sur le calcul ne relevant pas de l'espace de l'autre : la révolution numérique envisage l'espace comme un tout uniformisé, sans localité ni diversité à partir d'un point de vue extérieur, celui d'un fonctionnement algorithmique hors de tout espace. La légalité qui émane de ce nouveau partage est d'un tout autre ordre que l'ancienne, d'autant plus difficile à saisir qu'elle est en cours de construction et qu'il s'agit encore d'une proto-légalité. Ce nouveau « partage du monde » prend de court le droit comme le politique, en redéfinissant la plus-value économique, en offrant de nouvelles armes à la contestation sociale, en renouvelant les instruments de contrôle politique et en disqualifiant les récits collectifs au profit du calcul ; sans toutefois parvenir à éliminer le partage de l'espace qui reste l'acte fondateur des communautés humaines et de leur droit, seul moyen d'éviter la propagation de la violence.
Antoine Garapon, magistrat, a longtemps animé l'institut des hautes études sur la justice et ses émissions consacrées au droit sont bien connues des auditeurs de France Culture. Jean Lassègue, philosophe, est directeur de recherche au CNRS (Centre Georg Simmel – EHESS). Ensemble ils ont publié : Justice digitale. Révolution graphique et rupture anthropologique (Puf, 2018). Le présent ouvrage est la suite de leurs réflexions sur l'impact du numérique sur le droit.
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