lundi 28 février 2022

Jean Baptiste Brenet : Que veut dire penser ? Arabes et latins

 Rivages - Mars 2022


On ne sait pas ce que penser veut dire. Il n’est pas de mot plus banal, de phénomène humain plus courant, plus commun, et la chose même, pourtant, se dérobe. Ce livre voudrait revenir sur cette variété qui place la pensée, entre l’intelligence pure et le corps. Constitué de brefs chapitres, écrit de façon libre, cet essai explore les mots, le lexique : comment on a tâché de dire, en latin, et en arabe aussi, ce que d’un seul vocable imparfait nous appelons « pensée ».

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Patrick Dupouey : La croyance. Comment savoir ce qu’il faut croire ?

 Vrin - Février 2022



Vivre sans croyances? Il faudrait pour cela que nous sachions tout ce que nous avons le besoin ou le désir de connaître. Mais il y a de l’incertain, de l’hypothétique, du probable. Peut-être des choses dont la connaissance échappe à nos humaines facultés. Croire, il le faut donc. Mais pas n’importe quoi, ni n’importe comment.
Quels sont les critères d’une croyance recevable? La vérité s’impose comme une norme absolue pour tout jugement. Mais on ne peut négliger la manière dont nous formons nos croyances, ni leurs effets pratiques.
L’univers de la croyance est immense, il faut y introduire des distinctions : opinion, jugement, conjecture, foi. Cette étude explore les principales directions philosophiques dans lesquelles s’est engagé ce questionnement.

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Nathalie Roseau : Le futur des métropoles. Temps et infrastructure

Mētis Presses - Février 


Objet controversé, l’infrastructure est l’entrée par laquelle cet ouvrage interroge la production imaginaire et concrète de l’espace urbain. L’étude de trois métropoles – New York, Paris, Hong Kong – permet d’approfondir les rapports au temps qu’entretiennent les villes et leurs infrastructures, construites pour durer alors même que leurs fonctions sont destinées à évoluer.

Nathalie Roseau propose ainsi une relecture des grands artefacts urbains qui nous environnent, racontant les débats qui les ont accompagnés et les crises auxquelles ils sont encore confrontés. Elle envisage les infrastructures dans une perspective située et transnationale et identifie, à la manière de l’archéologue, les traces visibles et invisibles de leur sédimentation. Les récits du parkway newyorkais, de Roissy Charles-de-Gaulle et du périf parisien, ainsi que de l’infrastructure hongkongaise dévoilent les attentes d’une société au regard des temps à venir et clarifient les rapports de force entre pouvoirs et représentations, instituant le projet comme une chaîne de convergences et de conflits, de décisions et de revirements.

Réflexion sur l’urbanisme comme savoir et pratique, cet ouvrage interroge la valeur des futurs projetés et propose un changement de perspective face aux transformations qui s’imposent aux métropoles. Ancrées dans l’histoire des villes, les infrastructures dialoguent avec les défis du présent.

SOMMAIRE

Introduction/ La ville aux prises avec le temps, 9

Les mots de la grande ville, 9 / L'infrastructure de la ville-territoire, 11 / Dialectiques infrastructurelles, 13 / La ville au présent, 15 / Une perspective rétrospective, 17

1/ «IMPOSSIBLE UTOPIAS»: NEW YORK, L’ODYSSÉE DU PARKWAY

IDÉE ET OBJET, 25

L’AGRANDISSEMENT PAR LE PAYSAGE, 29
Civilization versus wilderness, 29 / Les origines du parkway, 31 / New York hors les murs, les parkways de Brooklyn, 33

LA VOIE COMME NARRATION, 37
23rd and 24th wards, vers le Greater New York, 38 / «Gardens for the machine», les parkways du Westchester, 40 / Paysage et photographie, 46

L'UNITÉ DE L'AMÉNAGEMENT, 49
Ville, métropole, région: l'élasticité du plan, 49 / Parkway, Highway, Freeway: les glissements de la voie, 52 / Le plan versus la performance, 55 / Médiatisations, 60

L'ÉCLIPSE DU PROJET, 65
Le cœur des villes, l'autoroute comme Pharmakon?, 66 / «The exploding metropolis», 69 / Paysagistes, ingénieurs, planners: les déplacements de l'infrastructure, 71

CRISE ET RENAISSANCE, 75
D’Olmsted à Moses, icônes urbaines, 75 / Parkway design: un paradis perdu?, 80 / «Rethinking», la grande échelle en question, 82

LA MÉMOIRE DE LA VILLE AU PRÉSENT, 87


UN AUTRE PRÉSENT S'INSTALLE DANS LE FUTUR» : PARIS, DU PÉRIF À L'AÉROPORT

ÉVÉNEMENT ET MONUMENT, 101

UNE FIN ET UN COMMENCEMENT, 105
Le Grand Paris, idée et réalité, 105 / De la ville à l'infrastructure, une intime relation, 108 / 1973-1974: synchronies et dissonances, 112

HORIZONS D’ATTENTE, ESPACES D'EXPÉRIENCE, 117
Promesses et usages, 117 / Le temps paramètre du projet, 120 / Le futur en crise, 122

NARRATIONS ET PROJETS, 125
Les Paris du Périf, 125 / Roissy au-delà de Paris, 130 / Le projet total: cohésion ou dissension, 133

LES LIEUX DU GRAND, 135
Monumentalités, 135 / Hétérogénéités, 138 / Élite et masse, 140

DES OBJETS QUI RÉSISTENT, 143
L'impensé du territoire, 143 / L'espace en mouvement, 145 / Le retour du super-projet, 149 / Les ambivalences du Grand Paris, 152

LA MATÉRIALITÉ DE LA VILLE DES FLUX, 157



3/ «THE SHAPE OF THINGS TO COME»: HONG KONG XXL, 169

RELATION ET DISPOSITIF, 171

RENDRE VISIBLE LE FUTUR QUI ADVIENT, 173
Réformes territoriales, le domaine des possibles, 173 / Objet et projet politiques, 175 / La controverse aéroportuaire, 178

NOUVELLES TERRITORIALITÉS, 181
Coalitions, 181 / La création d'un territoire, 183 / Airport back into the city, 185 / La médiatisation de l'événement, 188

LA VILLE NARCISSE, LE MIROIR ET SON DOUBLE, 191
Micromonde versus macromonde, 192 / Mégastructure versus infrastructure, 195 / Image versus usage, 199

DE L'ÉMANCIPATION À L'INTÉGRATION, 203
De la métropole à la région, la course infrastructurelle, 203 / Horizons post-2047, la ville duale, 206 / Pannes des projets et impasses des récits, 207

QU'EST-CE QUE LA VILLE-MONDE?, 211

Conclusion/ L'infrastructure comme milieu, 221

Bibliographie, 225

Sources, 245

Remerciements, 249

Crédits, 251


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dimanche 27 février 2022

Eric Hoffer : Le Vrai croyant. Pensées sur la nature des mouvements de masse

 Les Belles lettres - Février 2022


Le Vrai Croyant (The True Believer) est un des classiques les plus provocateurs de la pensée sociale, devenu depuis sa parution en 1951, un véritable best-seller et un ouvrage influent.
Il est l’œuvre d’Eric Hoffer, docker et grand lecteur, et a été écrit au cours des années 1940 dans les gares de triage de San Francisco.
Hoffer y dessine une théorie remarquablement suggestive du type de changement social qu’il résume sous le nom de « mouvement de masse ».
À l’aide d’exemples concrets tirés d’un large éventail historique, l’esprit du fanatique et la dynamique des mouvements de masse y sont méthodiquement analysés. D’où viennent-ils ? D’une tentative désespérée pour compenser le manque de sens de la vie ; d’une régression – entraînée par la vitesse des changements – de la maturité de ceux qui ont grandi dans une société différente. Sont-ils identiques ? Qu’ils soient politiques ou religieux, radicaux ou réactionnaires, les mouvements de masse sont interchangeables car l’important est de faire partie du mouvement.

Eric Hoffer (1902-1983) était autodidacte. Refusant l’étiquette d’intellectuel, il considérait les marginaux comme les pionniers de la société. Issu d’une famille d’immigrants alsaciens, il craint, enfant, de devenir aveugle. Cette peur le transforme en lecteur compulsif, notamment de Montaigne qu’il admire. Sa vie est faite de petits riens : vendeur d’oranges, chercheur d’or, serveur dans des restaurants, ouvrier agricole itinérant… Après Pearl Harbor, il travaille comme docker à San Francisco pendant vingt-cinq ans. Auteur de plus de dix livres, dont The Passionate State of Mind, The Ordeal of Change et The Temper of Our Time, Eric Hoffer a reçu la médaille présidentielle de la liberté en 1983.

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Sophie Audidière : Passions de l'intérêt. Matérialisme et anthropologie chez Helvétius et Diderot

 Champion - Février 2022


Qu’en est-il de la « philosophie de l’intérêt » dans l’histoire du matérialisme du XVIIIe siècle ? En prenant l’intérêt depuis son déploiement anthropologique chez Helvétius et Diderot, ce livre apporte les éléments pour une révision de l’histoire moderne de la philosophie. On suivra le fil conducteur qui définit la science de l’homme comme le domaine des lois de l’intérêt, c’est-à-dire ce qui, chez Condillac, présidait à la genèse des opérations mentales : un mouvement propre à l’homme ordonné par la recherche du plaisir et la fuite de la douleur. La science de l’homme comme être intéressé se déploie en une théorie de la connaissance comme intérêt, une analyse des passions comme affects socialisés, et une politique de l’utilité dont la visée est l’émancipation. Cet ouvrage fait apparaître un matérialisme éclairé, ancrant la dynamique d’émancipation dans le corps sensible et laborieux, sans l’y fonder ; relevant d’une appréhension de l’expérience et de la pratique humaines, mais non de la substance ou de la production. Philosophie non utilitariste de l’intérêt, elle appréhende l’humain par tout ce à quoi il prend part et par quoi il est pris, y compris son aspiration à l’émancipation. Le sujet qui juge y est un corps sensible engagé dans l’histoire, cogito particeps, chez qui l’entendement n’est pas la mesure de la vie mais une de ses ressources.

Sophie Audidière est Maîtresse de conférences à l’Université de Bourgogne-Franche-Comté et membre du laboratoire Logiques de l’agir.

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Olivier Abel : De l'humiliation

 Les Liens Qui Libèrent - Février 2022


Quel rapport entre les crimes abjects des djihadistes, le danger que représentent à certains égards les « réseaux sociaux » pour la démocratie et la civilité, la question de la liberté d’expression et du blasphème, le durcissement quasi-guerrier de la laïcité, les gilets jaunes, les majorités dangereuses qui ont porté Trump ou Erdogan au pouvoir, et qui poussent à nos portes ? Nous ne comprenons pas ce qui nous arrive, ces colères qui montent en miroir sans plus rien chercher à comprendre, nous ne savons et sentons plus ce que nous faisons. Je voudrais proposer ici une hypothèse. Nous avons globalement fait fausse route. Nous nous sommes enfoncés dans le déni de l’humiliation, de son importance, de sa gravité, de son existence même.

L’humiliation est partout dans nos sociétés, et nous ne la voyons pas. C’est qu’elle est difficile à mesurer, et semble subjective : ce qui humiliera l’un laissera l’autre indifférent. Elle est même souvent instrumentalisée par le machiavélisme politique, ou pire, le fanatisme religieux, quand elle n’est pas tout simplement une technique managériale. Et cela, d’autant plus que nous nous sommes enfoncés dans le déni de l’humiliation, de sa gravité, de son existence même. Nos sociétés sont sensibles aux violences et aux inégalités, mais insensibles à l’humiliation qui les empoisonne, et il nous faudrait enquêter sur les racines de cette insensibilité. Et pourtant l’humiliation est là : si les violences s’attaquent au corps de l’autre, l’humiliation s’attaque à son visage. L’humiliation fait taire le sujet parlant, elle lui fait honte de son expression, de ses croyances et de ses goûts, elle ruine sa confiance en soi, elle dévaste pour longtemps les circuits de la reconnaissance, et laisse derrière elle une parole dérisoire ou fanatique. Elle peut également atteindre des minorités langagières, sexuelles, raciales, religieuses, sociales, etc. Il arrive même qu’une majorité soit humiliée par une minorité dominante, et devienne une majorité « dangereuse ». L’humiliation du Traité de Versailles prépare la venue de Hitler au pouvoir. Beaucoup de nos sociétés jadis démocratiques sont rongées par ces manipulations de la peur et ces politiques du ressentiment, qu’attisent les « réseaux sociaux » et les médias où s’affichent librement les haines et les mépris. La barbarie pousse à nouveau aux portes de notre Histoire. C’est pourquoi il est urgent d’imaginer ce que serait une société dont les institutions (police, préfectures, administrations, prisons, hôpitaux, écoles, etc.) seraient exemplairement non-humiliantes. Dans l’état actuel de nos économies, il faudra un énorme effort pour obtenir une société plus juste, mais pourquoi ne pas essayer de mettre en œuvre une société moins humiliante ? C’est possible et urgent, faisons-le.

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samedi 26 février 2022

André Motte : Démocrite d'Abdère. Aux origines de la pensée éthique

 Ousia - Février 2022


Si Démocrite est bien connu comme génial inventeur de l’atomisme, avec son maître Leucippe, on ignore généralement qu’il est aussi l’auteur d’une œuvre éthique importante, attestée par de nombreux fragments. C’est le cas, à tout le moins, dans les pays de langue française, où l’étude de ces textes a été longtemps négligée. La situation a heureusement évolué, mais le présent ouvrage est le premier à être entièrement consacré à cette matière. Textes à l’appui, – tous les fragments et témoignages concernés sont exploités et produits en appendice avec traduction – André Motte s’emploie à montrer le champ très ample que couvrait cette éthique, ses principales lignes de force et son originalité. Un chapitre fait voir également la large audience qu’elle a connue dans l’Antiquité, tant à Rome qu’en Grèce. Démocrite est l’un des premiers à avoir consacré à la pensée morale des ouvrages distincts et mérite assurément le titre de moraliste, mais il est aussi, selon l’auteur, un des fondateurs de ce que nous appelons l’« éthique » en ce que celle-ci implique l’idée d’une conscience morale personnelle. S’il partage pareille conception avec Socrate, le philosophe d’Abdère est, sous ce rapport, à l’origine d’un courant de pensée qui s’écarte de la voie tracée par le maître de Platon et que ce dernier a brillamment développée.

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Nicolas Comtois : De la métaphysique à l'exigence démocratique. Entretiens avec Jean-Marc Narbonne

 Vrin - Février 2022


Jean-Marc Narbonne est reconnu internationalement pour ses travaux sur le néoplatonisme et la métaphysique grecque. Il dirige actuellement la Chaire de recherche du Canada en Antiquité critique et modernité émergente (ACME), qui vise à mettre en lumière le rôle que l'héritage philosophique et littéraire de la Grèce antique a joué dans la modernité, et son importance pour la démocratie telle que nous la connaissons et qu'il nous revient encore aujourd'hui de la construire. Les présents entretiens permettent de mieux comprendre les liens qui unissent ces deux moments de sa trajectoire, depuis son point de départ dans la vie intellectuelle au Québec et dans les débats contemporains de la philosophie continentale. Ils se veulent ainsi le portrait d'un penseur original, qui est resté fidèle à des questions posées dès ses années de formation et à une culture antique qu'il n'a cessé par ses travaux d'illustrer et de faire connaître.

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François-Xavier Putallaz : Qu´est-ce que la nature ? Suivi de "Enfin la nature !" dit-elle, de Fabrice Hadjadj

 Salvator - Février 2022


Devant l'urgence environnementale, la « nature » est à la mode et, virant au slogan, encourt le risque de devenir le dernier des artifices. Il convient donc de repenser radicalement le concept de nature, confrontant l'intelligence des Anciens, notamment celle d'Aristote, aux défis postmodernes. En quoi l'homme est-il, par la pluralité même de ses cultures, un être de nature ? Comment s'articulent nature et liberté, ou nature et technique ? Pourquoi la multitude bigarrée des vivants nous rappelle-t-elle notre vocation de bâtisseurs d'arches ? Telles sont les questions abordées dans ce petit livre, qui renvoie dos à dos le biocentrisme romantique et l'anthropocentrisme dévié, et fournit les éléments d'une écologie vraiment intégrale.

François-Xavier Putallaz est professeur de philosophie à l'Université de Fribourg (Suisse). Ancien membre du Comité international de bioéthique de l'UNESCO, il a publié aux éditions du Cerf Le mal (2017) et La philosophie sans prise de tête (2020). Fabrice Hadjadj est directeur de l'institut Philanthropos.

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N'Dré Sam Beugré : Spinoza. L'évangile pour l'homme

 L'Harmattan - Février 2022


Spinoza propose un nouvel évangile pour l'homme : la liberté et le salut. Ils conduisent l'homme dans la joie de la bonne nouvelle. C'est pourquoi, l'évangile de l'homme est un objectif prioritaire, mais ce n'est pas une fin directement poursuivie proportionnellement aux ressources utilisées. Pour le promouvoir, il faut mettre en place des conditions sociales, puis sa mise en oeuvre effective relève en partie de la sphère individuelle et se réalise dans une dynamique sociale où elle devient instrument et fin des autres variables et des valeurs sociales. L'évangile de l'homme, à l'instar de l'augmentation de la puissance d'existence, est une fin en soi, mais, en l'absence d'une seule relation fonctionnelle, le développement des capacités peut être à la fois une fin, un moyen et une condition préalable à autre chose. Tout cela ne signifie pas que l'évangile doit être soumis à des compromis qui nient sa valeur intrinsèque, mais cela signifie que, pour se réaliser, une valeur sociale et individuelle aussi complexe doit entrer dans de multiples dynamiques pas toujours linéaires et pas toujours destinées au même but.

N'Dré Sam Beugré est docteur en philosophie et directeur de l'IRePh (Institut de recherches et d'études philosophiques).

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Audran Aulanier et Guillaume Gass-Quintero (dir.) : Phénoménologies de l'étranger, du quotidien et de la morale. Waldenfels et Schütz

Le Cercle Herméneutique - Février 2022

Audran Aulagnier et Guillaume Gass-Quintero s’efforcent de définir ce que peut être une phénoménologie sociale, à savoir décrire le tissu social et la quotidienneté (Lebenswelt) dans sa trame intersubjective et comment nous nous situons par rapport à lui. Il suit en cela le fil des travaux d’A. Schütz et de B. Waldenfels, figures majeures de la philosophie allemande de deux générations différentes. Ce tissu social serait constitué d’une diastase entre un appel (qui peut être la souffrance de chacun ou d’autrui) et un répondant. Nous retrouvons le thème de responsivité, déjà exploré dans un précédent numéro du Cercle Herméneutique par Simon Calenge. Cette tension appel-réponse joue le rôle de l’intentionalité husserlienne. On comprendra l’importance de ce travail pour éclaircir les problèmes d’intégration, du se-sentir-étranger, y compris lorsqu’on rentre dans son propre pays (homecomer), et de constitution de toute identité vivante.
Hors dossier – Francesca d’Alessandris, spécialiste de la philosophie de Ricoeur, se pose la question du caractère pré-narratif de toute volonté. Elle confronte les thèses du Ricœeur du Le Volontaire et l’Involontaire avec celles de l’identité narrative du Soi de Soi-même comme un autre. Elle réévalue de ce fait l’idée de volonté, conçue comme poiesis. Dans l’étude suivante, P.-E. Schmidt montre comment la littérature joue un rôle que la philosophie ne peut pas assumer, cela à travers la lecture merleau-pontienne de Proust et de Claude Simon. En troisième étude, G. Charbonneau s’interroge sur l’évolution du concept de fantasme dans une perspective post-freudienne. Considérant que les fantasmes, d’où qu’ils viennent, sont des fictions, il se demande en criminologue clinique dans quelle mesure chacun est responsable de ses fantasmes. En quatrième étude, R. Bellouti donne des éléments pour appréhender l’expérience humaine en service de soins palliatifs. En cinquième étude, nous avons retrouvé un texte inédit du psychiatre phénoménologue, R. Kuhn, découvreur des antidépresseurs, sur la bonne distance thérapeutique et ses équilibres complexes.
M. Leborgne Lucas enfin restitue une expérience corporelle rarement explorée, celle de la menstruation en tant que corps cyclique. C’est la présence simultanée à soi et à autrui dans cette expérience qui tente de se définir.

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Sylvie Coirault-Neuburger : Politique de l'individu-citoyen. Contre la pénétration des théories fascistes (1922-2022)

 L'Harmattan - Février 2022


Il y a un siècle, en 1922, Mussolini prenait le pouvoir avec sa « doctrine du fascisme ». Dans cet ouvrage, Sylvie Coirault-Neuburger se propose d'aider la philosophie à quitter sa révérence envers certaines idoles douteuses, comme Næss, Jünger, Kojève, par l'étude approfondie de l'hospitalité, des guerres civiles, de l'économie, etc. La radicalisation et les théories de la « stasis » et de l'« hostis », inspirées de Carl Schmitt dont le nazisme n'empêche pas qu'il soit cité partout, tentent en 2022 de rendre les peuples ingouvernables afin de faire émerger un dictateur décisionnaire se passant du contrôle de la loi. Malgré les injonctions paradoxales de l'enseignement actuel, chaque individu-citoyen doit pouvoir oser dire son opinion, à partir de l'histoire et de son histoire, et sauver la démocratie.

Sylvie Coirault-Neuburger, ancienne élève de l'École normale supérieure et de Sciences Po, est philosophe et docteur en sciences du langage.

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vendredi 25 février 2022

Florence Renucci (dir.) : Dictionnaire des juristes. Colonies et Outre-mer XVIIIe-XXe siècle

 PU de Rennes - Février 2022

Ce dictionnaire est le fruit d'une recherche collective qui rassemble des historiens, des historiens du droit et des praticiens. Il débute à la fin de l'Ancien Régime, à une période où sont publiées les premières compilations analytiques de référence sur l'organisation administrative et judiciaire de l'Empire français. Et c'est au moment de la « coopération » qu'il s'achève, c'est-à-dire après les indépendances, tandis que des liens officiels et humains perdurent afin d'assurer la transition institutionnelle.
Le présent ouvrage comble un vide historiographique sur les acteurs qui ont participé à l'élaboration et aux mutations du droit colonial, du droit d'Outre-mer et, parfois, des droits des nouveaux États souverains. Son principal objectif est en effet de déterminer qui étaient ces juristes, quelles ont été leurs actions sur le droit et leurs motivations. À cette fin, les notices présentent les origines sociales et la carrière de ces hommes, et analysent leurs oeuvres doctrinales et/ou politiques. Ce double aspect constitue une valeur ajoutée du point de vue scientifique car il interroge le lien entre, par exemple, formation et manière de concevoir le droit, ou, plus généralement, entre « l'être » et le « faire ». L'exploitation des documents d'archives accessibles en France et à l'étranger a été déterminante.

Florence Renucci est directrice de recherche au CNRS. Historienne du droit, spécialiste des questions juridiques coloniales et postcoloniales, elle est rattachée à l'Institut des mondes africains.

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Rémi Brague : Après l´humanisme. L'image chrétienne de l'homme

 Salvator - Février 2022


Le concept paraît presque désuet, tant est consommé ce qu'il convient d'appeler une « crise de l'humanisme ». Son essoufflement ne se traduit pas par la profusion de discours dédaigneux vis-à-vis de l'homme, ne nous méprenons pas. C'est par « compassion» que cet humanisme, vide de sa substance, envoie ses métastases. C'est de vouloir être mieux humain, seul humain, trop humain que l'homme moderne engendre des chimères. L'homme nouveau rêve par les différents régimes fascistes ou soviétiques fut un avant-goût de l'homme augmenté rêvé par les transhumanistes ; de même l'Untermensch trouve aujourd'hui ses avatars dans la foule de ceux qui ne ressemblent pas au projet voulu pour l'humanité. La tentation de définir l'homme à partir de lui-même (c'est-à-dire, en pratique, à partir de soi-même) conduit invariablement à reléguer une partie des hommes au rang de « sous-hommes ». Seule une image de l'homme qui le sauve empêche ce clivage idolâtre.

Rémi Brague est professeur émérite de philosophie médiévale, arabe et juive a l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, ainsi qu'à l'université Louis-et-Maximilien de Munich, où il a occupé la chaire Romano-Guardini. Membre de l'Institut de France, il a reçu de nombreuses distinctions pour son oeuvre, dont le prix Josef Pieper et le prix Ratzinger. Philanthropos est un institut universitaire situé à Fribourg (Suisse) qui propose une année de formation intégrale par la philosophie, la théologie, les sciences humaines et le theâtre. Son activité académique se déploie dans le cadre d'une vie communautaire, de sorte que l'étude n'y apparaît pas comme une spécialité, mais comme ce qui jaillit de la vie quotidienne et y retourne pour l'illuminer. Il s'agit de se mettre, en somme, à l'ecole du Verbe fait chair.

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Pierre de Saint-Phalle : Normes et valeurs de la dette (1787-1791). Une institution financière, sociale et politique

 Classiques Garnier - Février 2022


Histoire et philosophie sont mobilisées pour étudier la dette publique. L'insurrection de 1789 repose en partie sur « le spectre de la banqueroute ». La dette est sacrée dès le serment du Jeu de Paume, la Constitution de 1791 interdit d'en empêcher le paiement. Les enjeux sociaux, les théories, les discours et les institutions de la dette sont retracés depuis 1720. Cette enquête historique est l'occasion de décrire les liens plus généraux entre valeurs, normes et institutions. Considérer trois pratiques discursives (normative, normatrice et positive) permet de décrire cet objet en lien avec l'ordre social, politique et financier moderne.

Pierre de Saint-Phalle est docteur en philosophie (université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) et en science politique (université de Lausanne). Il est actuellement maître d'enseignement et de recherche suppléant à l'Institut d'études politiques de Lausanne, au Centre Walras-Pareto de l'histoire de la pensée économique et politique.

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Juliette Roussin : La constitution de la démocratie. Égalité et communauté chez Ronald Dworkin

 Hermann - Février 2022


D’où la démocratie tire-t-elle sa valeur ? De ce que le plus grand nombre y exerce le pouvoir politique ? Ou bien de la protection des droits et des libertés que ses institutions législatives, exécutives et judiciaires garantissent à chaque personne ? Connu en France en tant que philosophe du droit, penseur du libéralisme et des fondements de la justice sociale, Ronald Dworkin a aussi développé une conception originale de la démocratie. Pour lui, la démocratie n’est pas une procédure, mais une communauté, organisée autour des principes de participation, de réciprocité et d’indépendance éthique. Ces principes politiques et moraux sous-tendent la constitution et informent les relations entre ses citoyens. C’est pourquoi l’opposition entre autogouvernement et protection des libertés relève d’une fausse alternative : les juges constitutionnels, en particulier, qui ont la charge d’interpréter le sens et l’étendue des droits, ne s’opposent pas à la réalisation de l’idéal démocratique. Au contraire : pour Dworkin, leur rôle est d’assurer que la communauté se gouverne conformément à ses principes et demeure, ainsi, une démocratie authentique.

Juliette Roussin, ancienne élève de l'École normale supérieure et agrégée de philosophie, est professeure adjointe en philosophie politique à l'université Laval (Québec). Ses recherches portent sur les fondements de la légitimité démocratique et l'égalité politique.

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Raphaël Künstler (dir.) : Métaphysique et Sciences. Nouveaux problèmes

 Hermann - Février 2022


La métaphysique de tradition analytique ou continentale est florissante. Elle n’est plus seulement travaillée comme objet de l’histoire de la philosophie, elle est redevenue sujet de l’activité philosophique et productrice d’œuvres nouvelles – qu'il s'agisse de la tradition dite continentale ou de celle dite analytique. Du côté « continental », hérité de Heidegger, c’est estimer que la métaphysique, en tant qu’enquête rationnelle sur l’être, doit être dépassée au profit d’un questionnement poétique. Du côté analytique, hérité du Cercle de Vienne, et notamment de Carnap, c’est prolonger l’œuvre de philosophes qui estimaient que la logique symbolique nouvellement façonnée devait permettre d’établir le fait que tous les énoncés métaphysiques étaient dénués de sens. L’apologiste de la science que fut Carnap, tout comme son pourfendeur que fut Heidegger, ont l’un et l’autre convergé sur un même mot d’ordre : « le dépassement de la métaphysique ». Ce renouveau actuel est donc d’autant plus étonnant que ces deux courants se réclamaient l’un et l’autre de l’héritage de Kant, lequel récusait déjà la triple ambition de la métaphysique théorique à connaître rationnellement la surnature, les choses en soi et les faits ultimes constituant la nature. Cet ouvrage, qui réunit d'éminents spécialistes de la question, propose ainsi un état des lieux de la réflexion métaphysique contemporaine.

Raphaël Künstler est normalien, agrégé et docteur en philosophie, actuellement PRAG au département de philosophie de l’université Toulouse II Jean Jaurès. Il est l’auteur d’une thèse visant à répondre à argument de la méta-induction pessimiste contre le réalisme scientifique.
Claudine Tiercelin (préface) est philosophe, professeur au Collège de France, où elle est titulaire de la chaire de Métaphysique et philosophie de la connaissance.

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Cahiers critiques de philosophie n° 24 : Georges Navet, le fil clandestin de la fiction

 Hermann - Février 2022


Silvana TOTORA : Miguel Abensour : une pensée insurgeante
Sara FADABINI : Identités rhizomatiques. Sur quelques thèmes deleuziens chez Édouard Glissant
Cezary VODZI SKI : Ombres et lumières du mal
Friedrich NIETZSCHE : Fatum et histoire (1862) ; Vouloir libre et Fatum (1862)
Patrice VERMEREN : Pour Georges Navet. Cérémonie d’Adieu. Suivi de G. Navet Le gouvernement de la philosophie
Stéphane DOUAILLER : En proie à un abécédaire inépuisable.
Patrick VAUDAY : Pourquoi la littérature ?
Bruno CANY : Hommage du département de philosophie.
Edouard CASLETON : L’intelligence discrète de Georges Navet. Quelques souvenirs.
Marcos GARCIA de la HUERTA : Hasta siempre, Georges Navet.
Silvana RABINOVITCH : Pierre Leroux, auteur du livre de Job. A propos de certains précurseurs de Georges Navet.
Louise FERTE : Sur quelques lectures dixneuviémistes de Georges Navet : François Guizot et Edgar Quinet.
Claudia GUTIERREZ OLIVARES : Georges Navet lecteur de Miguel Abensour
Renzo RAGGHIANTI : Entre Montaigne et Péguy : le bergsonisme de Thibaudet
Chantal GAILLARD : Georges Navet et la Société Proudhon : une fidélité active.
Bibliographie de Georges Navet.
Georges NAVET : Cahiers (Georges Navet au département de philosophie de Paris 8).
Natalia PRUNES : Rapports historiques de pouvoir dans l’histoire de la langue espagnole.
Patrice VERMEREN : À propos de L’écart absolu : Miguel Abensour de Gilles Labelle.

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mercredi 23 février 2022

Renaud Hétier : La Liberté à corps perdu. Comment retomber sur Terre

 Le Pommier - Février 2022


Jamais nous n'avons été aussi libres, de penser, de nous exprimer, de nous déplacer. Et jamais, pourtant, nous n'avons été aussi aliénés?: nous multiplions les dépendances, nous nous contraignons nous-mêmes au travail, nous nous précipitons tête baissée et yeux fermés vers notre fin, dans le grand effondrement dont nous sommes nous-mêmes la cause. Quel peut être alors le sens d'une telle liberté ? Ou plutôt : dans quel sens va-t-elle ? Renaud Hétier soutient que la liberté n'est pas, ne peut plus être, un « arrachement » - à notre corps, au corps à corps avec les autres, à la nature. Retomber sur Terre ? Oui, du moins la sentir sous nos pieds, éprouver le soutien qu'elle apporte à notre liberté. De ce point de vue, et contrairement à ce que l'on pense trop spontanément, la nature ne nous limite pas?: elle nous donne un espace où exprimer notre liberté.

Ancien professeur des écoles aujourd'hui professeur à l'Université catholique de l'Ouest, Renaud Hétier est notamment l'auteur de L'Humanité contre l'Anthropocène. Résister aux effondrements (PUF, 2021).

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David Hamidovic : Dans l'antichambre. Pour un dialogue entre la pensée juive et la connaissance renouvelée du judaïsme ancien

 Hermann - Février 2022


La connaissance du judaïsme ancien s’est profondément renouvelée depuis les années 2000. Les déchiffrements achevés, les manuscrits de la mer Morte (notamment ceux de Qumrân) concourent grandement à ce renouveau : soit ils enrichissent le corpus avec des textes inconnus rédigés avant l’ère chrétienne, soit ils jettent un éclairage nouveau sur des questions anciennes qui structurent la pensée juive.
Le présent ouvrage a deux objectifs : d’abord, il réunit les derniers résultats de la recherche sur des thèmes majeurs comme le temps et les temporalités (apocalyptique, eschatologie, vie post-mortem, liturgie), l’identité, l’ethnicité et la société (statut des prêtres et des sages, place de la femme, « identité juive », antijudaïsme, création d’un groupe religieux), Dieu (place des démons et des anges, pauvreté, messianisme et salut, dualisme), le rapport au texte et son autorité (écriture et réécriture, processus d’autorité, concept de révélation, place de l’hébreu). Mais surtout, ce livre plaide pour un renouvellement du dialogue, dans l’esprit de la Wissenschaft des Judentums, entre les historiens du judaïsme ancien et les spécialistes de la pensée juive.

David Hamidovi, docteur en histoire de l’Antiquité, est professeur ordinaire à la chaire « Littérature apocryphe juive et histoire du judaïsme dans l’Antiquité » de l’université de Lausanne.

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Gérard Rabinovitch (dir.) : Crise de l'autorité et de la vérité. Les complotismes toxiques

 Hermann - Février 2022


Toute démocratie repose, selon Léo Strauss, sur des valeurs essentielles, qui organisent la vie politique. Nommons, ici : la raison, la liberté et l’éthique. Ces valeurs sont aujourd’hui fortement dégradées: la raison n’est plus l’exigence du discernement, mais est réduite à un calcul ; la liberté n’est plus l’exigence d’autonomie en vue du bien commun, mais se résume à une revendication licencieuse d’un « tout est permis » ; l’éthique, enfin, ne renvoie plus à un effort d’élévation dans la vie de l’Esprit, mais se confond avec l’expression de bons sentiments angéliques qui nient parfois les contraintes du réel. Comment comprendre la désagrégation du politique en ses fondements ? Comment surmonter la crise de l’autorité et de la vérité ?

Avec les contributions de :

Marc Angenot, Denis Charbit, Daniel Dayan, Patrice Gueniffey, Jolanta Kuska, Fabien Lebrun, Gérard Rabinovitch, Philippe Raynaud, André Sénik, Henri Vacquin.

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Henri Laux : Spinoza et le christianisme

 PUF - Février 2022


Il est difficile de trouver dans l'histoire une opposition plus totale que celle de Spinoza et du christianisme. Le philosophe s'en prend aux Églises, aux croyances, aux théologiens ; il dérange par sa conception de Dieu. Il passe pour athée mais s'en défend ; il sera « mystique » pour d'autres. Mais est-ce si simple ? Et s'il était ailleurs ? Il fallait donc reprendre le dossier à la base : d'abord, comprendre. Loin des idées reçues, qu'en est-il du rapport de Spinoza au christianisme de son temps ? Qu'en dit-il, qu'en retient-il ? Et comment est-il interprété par les théologiens d'aujourd'hui ? Qu'en disent-ils ? Qu'en retiennent-ils ? L'accueil est contrasté, du rejet à la bienveillance. Pourtant voici que certains reconnaissent son extraordinaire puissance d'inspiration : une rencontre est donc possible. Spinoza s'écarte certes des énoncés majeurs du christianisme, mais c'est au point le plus radical de la confrontation qu'il faut l'entendre. Sur l'affirmation de Dieu comme sur l'exploration de la condition humaine, dans la diversité des champs de l'éthique, il le provoque à élargir ses espaces de compréhension. En somme, un nouveau regard sur une relation qui intrigue toujours.

Henri Laux, spécialiste de Spinoza, est professeur émérite de philosophie au Centre Sèvres-Facultés jésuites de Paris.

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Isabelle de Mecquenem (dir.) : Crise de la raison publique. La vie démocratique et ses ennemis

 Hermann - Février 2022


La raison publique, comprise comme une exigence de rationalité élargie au politique, est un projet essentiel des Lumières. Cet idéal se traduit concrètement dans le droit et par le fait d’autoriser chacun à communiquer librement ses pensées selon toutes les modalités de l’échange pour les soumettre à la réflexion critique d’une communauté de citoyens libres.
Or force est de constater que cette raison publique est aujourd’hui en crise. La raison publique est désormais le lieu d’expressions et de revendications particulières, sans visée universaliste. Et ce qu’il y a d’inquiétant dans cette dérive, c’est que l’hyper-subjectivisme contemporain se présente comme une forme d’émancipation. D’où l’urgence de réinterroger à nouveau compte cette raison publique qui vacille aujourd'hui.

Avec les contributions de :
Jacques Billard, Jean-François Braunstein, Natalie Felzenszwalbe, Fabien Ollier, François Rastier, Wiktor Stoczkowski, Pierre-André Taguieff, Serge Valdinoci.

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Stéphanie Roza : Lumières de la gauche

 Editions de la Sorbonne - Mars 2022


Le récent divorce d'une partie de la gauche avec le legs rationaliste, universaliste et progressiste des Lumières peut donner le sentiment que l'émancipation au sens moderne n'a qu'un lointain rapport avec ce qu'elle signifiait au XVIIIe siècle, voire qu'elle lui est franchement opposée. Le présent ouvrage entend revenir sur un lien historique parfois remis en question de nos jours. Pas à pas, il s'efforce de retracer l'histoire des relations des gauches égalitaristes, féministes et anticolonialistes à l'héritage du XVIIIe siècle, depuis la Révolution française jusqu'aux années 1960-1970, période où commencent à s'élever des critiques d'une virulence inédite contre cet héritage. Par là, on constate que les principaux courants idéologiques d'émancipation ne peuvent se comprendre que comme des prolongements critiques des combats politiques et sociaux des penseurs des Lumières. Des prolongements, en ce qu'ils visent fondamentalement à approfondir, à élargir et à concrétiser les promesses des Lumières ; critiques, en ce qu'ils s'efforcent d'en surmonter les limites et les contradictions, portant l'idéal d'autonomie et de liberté humaines à un niveau de radicalité jamais atteint. Dès le XVIIIe siècle, les cas de Gracchus Babeuf, Mary Wollstonecraft, Toussaint Louverture, respectivement premiers représentants des combats pour l'égalité économique, sexuelle et raciale, rappellent que les principes fondateurs de toute perspective de transformation sociale trouvent leur source dans la Révolution française. Par la suite, les grands débats de la gauche des XIXe et XXe siècles, de la Révolution russe aux luttes d'indépendance des peuples colonisés, de Marx à Sartre et de Kropotkine à C. L. R. James, confirment le lien identitaire des plus grandes figures de la gauche avec le message libérateur des Lumières. Il ne s'agit pas seulement ici de rappeler l'existence d'une filiation qui, pendant longtemps, est demeurée évidente aux yeux de tous, mais également d'analyser les manières, parfois très différentes, dont chacune de ces figures se rattache à l'héritage du XVIIIe siècle. Il existe ainsi plusieurs façons de s'approprier cet héritage à gauche, qui font émerger autant d'images rétrospectives des débats et combats du XVIIIe siècle. L'étude fait ainsi apparaître une grande diversité d'usages de ce legs, au croisement entre adaptation, sélection et démarcation critique.

SOMMAIRE

Introduction

Chapitre I.

À gauche de la Déclaration des droits de l'homme

Les Niveleurs

Réflexions prérévolutionnaires

Les Lumières babouvistes en Révolution

Le féminisme des Lumières à l'assaut du conservatisme : Wollstonecraft vs Burke

L'offensive burkéenne

La réponse de Mary Wollstonecraft

Naissance du féminisme universaliste

Les Jacobins noirs

De la révolte du tiers état à la révolte des esclaves

Toussaint

Défense des droits de l’homme noir

Chapitre II.

Les Lumières des prolétaires (1799-1848)

Les Lumières sans la Révolution ? Les exemples de Saint-Simon et Fourier

Saint-Simon et le legs illuministe

Charles Fourier, un anti-Lumières ?

Socialismes et socialistes

La lettre de Pauline Roland

Louis Blanc, Robespierre et la Révolution française

Rejetons indociles du républicanisme : les communistes français dans le premier XIXe siècle

Le robespierrisme d’Étienne Cabet

Communisme et matérialisme

Chapitre III.

Fils de l’Aufklärung (1815-1848)

L’Allemagne face aux Lumières et à la Révolution française de 1789 à 1815

La gauche allemande dans les années 1830-1840

Un jacobin nommé Ludwig Börne

Le retour aux Lumières des Jeunes-Hégéliens

Les voies divergentes des « Lumières du xixe siècle » : Bruno Bauer

Marx et Engels face à l’héritage français du XVIIIe siècle : position d’un problème

Contre Hegel… et Robespierre : la substantialité du social contre l’illusion du politique

Contre Bauer : la pratique révolutionnaire vs la théorie critique

Les oscillations de Marx et la rectification d’Engels

Chapitre IV.

Anarchisme et Lumières

« L’enfant terrible du socialisme »

Anticléricalisme et anti-rousseauisme

1789, aube d’une nouvelle ère

Prolonger 89 ou rompre avec ?

Bakounine : révolution nationale et révolution sociale

Du rejet de l’héritage illuministe au jeune-hégélianisme

Révolution et panslavisme

Anarchisme bakouninien et héritage illuministe

Kropotkine : « cette philosophie du XVIIIe siècle […] qui […] s’appelle aujourd’hui le communisme anarchiste »

Lumières scientifiques

Progrès historique et nature humaine

La grande révolution

Chapitre V.

Les Lumières en débat dans le mouvement ouvrier organisé (1864-1914)

Paradoxes du nietzschéisme de gauche

Les anti-nietzschéens de gauche allemands et l’héritage des Lumières

Nietzschéens de gauche en Allemagne : l’exemple de Gustav Landauer

Disputes socialistes autour d’un héritage révolutionnaire

La social-démocratie allemande face à la Révolution française

La social-démocratie allemande et les Lumières

Le républicanisme socialiste français face au marxisme

Nietzsche au pays de la Révolution française

Charles Andler ou la démocratisation du nietzschéisme

Georges Sorel : du marxisme à la haine de la démocratie

Édouard Berth : Nietzsche contre les « méfaits des intellectuels »

Chapitre VI.

La Raison à l’épreuve des catastrophes du XXe siècle

Rationalisme et irrationalisme chez Georg Lukács

D’Histoire et conscience de classe à La destruction de la raison

La destruction de la Raison et ses ennemis

Irrationalisme et romantisme

Jean-Paul Sartre : de l’existentialisme au rationalisme dialectique

L’existentialisme, de L’être et le néant à la conférence de 1945

« L’indépassable philosophie de notre temps »

Marxisme, universalisme et anti-impérialisme chez C. L. R. James

Le trotskysme de James

Le rôle des masses dans l’histoire

Épilogue : la rupture de 1944

Un « diamant noir écrit à minuit dans le siècle »

Les chausse-trappes de l’exagération

Du rejet de la raison instrumentale au rejet de la modernité


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mardi 22 février 2022

Réseaux 2022/1 (N° 231) : Critiques numériques

 La découverte - Février 2022


Page 9 à 37 : Olivier Alexandre, Jean-Samuel Beuscart et Sébastien Broca - Une sociohistoire des critiques numériques | Page 41 à 70 : Christophe Lécuyer - Mouvement syndical et critique écologique des industries numériques dans la Silicon Valley | Page 71 à 107 : Isabelle Berrebi-Hoffmann et Quentin Chapus - Des luttes éthiques aux luttes sociales | Page 109 à 136 : Clément Mabi et Irénée Régnauld - La critique du numérique par les « travailleurs du milieu » | Page 137 à 165 : Samuel Lamoureux - Penser le sabotage à l’ère du capitalisme numérique | Page 167 à 194 : Sébastien Broca - Le capitalisme numérique comme système-monde | Page 197 à 224 : Damien Renard - La justification des pratiques de co-création sur les plateformes de crowdsourcing | Page 225 à 257 : Louis Rénier, Aurélie Cardona, Frédéric Goulet et Guillaume Ollivier - La proximité à distance | Page 261 à 264 : Pascal Froissart - Fred TURNER, L’usage de l’art. De Burning Man à Facebook, art, technologie et management dans la Silicon Valley, traduit de l’anglais par Jay Demazière, Sophie Harris, Marine Kennerknecht et Hervé Le Crosnier, photographies de Burning Man par Scott London, Caen, C&F Éditions, 2020, 144 p. | Page 265 à 269 : Valentina Grossi - Angèle CHRISTIN, Metrics at Work. Journalism and the Contested Meaning of Algorithms, Princeton (NJ), Princeton University Press, 2020, 272 p. | Page 270 à 274 : Fardin Mortazavi - Jean-Paul FOURMENTRAUX, antiDATA – La désobéissance numérique – Art et hacktivisme technocritique, Dijon, Les Presses du réel, coll. « Perceptions », 2020, 232 p. | Page 275 à 278 : Alain Busson - Dominique BOULLIER, Comment sortir de l’emprise des réseaux sociaux, Paris, Le Passeur, 2020, 304 p..

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