Kimé - Octobre 2021
« Poétique du savoir : étude de l’ensemble des procédures littéraires par lesquelles un discours se soustrait à la littérature, se donne un statut de science et le signifie ». C’est de cette façon, en apparence modeste, que Jacques Rancière débute Les noms de l’histoire (1992). Mais comment comprendre cette affirmation a priori paradoxale selon laquelle une telle poétique utiliserait des « procédures littéraires » pour mieux se soustraire à la littérature ? Que penser, en outre, de cette idée selon laquelle l’historiographie telle qu’elle s’est pratiquée jusqu’ici aurait systématiquement occulté les conditions même de toute historicité ? L’essai s’avère rapidement être une critique lucide et radicale des fondements mêmes du savoir historique, prenant appui sur certaines hypothèses majeures que le philosophe n’aura de cesse de développer durant tout son parcours : le nouage entre politique et esthétique, l’alliance entre littérature et démocratie caractérisée par un désordre salutaire de la parole. Pourtant, malgré le caractère familier de ces termes pour le lecteur de Jacques Rancière, l’essai conserve toute sa densité, et même une certaine part d’équivocité : c’est parfois entre les lignes qu’il convient de traquer la position de l’auteur, et surtout de cerner les contours de cette « histoire hérétique » vers laquelle il nous entraîne et qui conserve toute son actualité. Fruit d’un travail collectif consacré à cet essai, le présent ouvrage a pour ambition de rassembler des contributions dissensuelles : à l’image de la philosophie qui les inspire, celles-ci, en confrontant Rancière à ceux avec qui il entre en dialogue (Michelet, Benjamin, Althusser, Thompson et d’autres), visent à leur tour à éclairer la force, et parfois les zones d’ombre, de la poétique de cette pensée qui se veut elle-même « hérétique ».
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