dimanche 30 août 2015

Barbara Cassin (dir.) : La rhétorique au miroir de la philosophie

Vrin - Août 2015 - BHP


Ont collaboré à ce volume : M. Aouad, A. Brancacci, L. Calboli Montefusco, B. Cassin, M. S. Celentano, P. Chiron, P. Demont,J. Dross, P. P. Fuentes González, Ch. Guérin, H. Maguire, E. Spinelli, C. Viano.

« Tous les modernes sont imprécis dans leurs définitions, alors qu’à travers toute l’Antiquité, on ne cesse de rivaliser – et spécialement entre philosophes et orateurs – pour définir correctement la rhétorique », écrit Nietzsche. C’est que la « rhétorique » n’est pas un objet existant, mais un objet fabriqué, et d’abord par la philosophie elle-même, un enjeu de pouvoir. Non seulement les définitions des philosophes et celles des orateurs ne coïncident pas, mais on a souvent bien du mal à savoir qui est « philosophe » et qui est « orateur », qui fait quoi et qui imite qui …
Cet ouvrage réunit les principales contributions au séminaire que le Centre Léon Robin a consacré aux « philosophiques et définitions rhétoriques de la rhétorique », pour mieux penser le statut du logos et le rapport entre sagesse et persuasion. Nous y avons travaillé de concert des composantes philosophiques, littéraires ou liées à l’histoire de l’art, tant grecques que latines, arabes ou byzantines, dans la longue durée plurilingue de la première transmission des humanités.

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Ernst Bloch : L'Angoisse de l'ingénieur

Allia - Août 2015


Avec L'Angoisse de l'ingénieur, texte à valeur de manifeste, Ernst Bloch démontre le piège que l'homme se tend à lui-même. Sentiment en vérité archaïque, l'angoisse trouve une forme nouvelle dans la quête perpétuelle d'un accès à l'inconnu, dont on ne peut mesurer encore les conséquences. De cette tension naît l'angoisse, autrefois reliée à l obscure et toute-puissante magie, mais dont les effets de la technique perpétuent le sentiment de terreur. L'antique démonisme n'est jamais loin, lorsque l'ingénieur freine en dernier ressort son avancée.
Ernst Bloch part non du point de vue de la technique mais de celui des fantômes et autres démons, ou plutôt de la croyance en leur existence. Monde chassé par les Lumières mais plus encore par la lumière artificielle, dont nulle magie n'émane plus. En bannissant les ombres et la présence de recoins sombres dans les maisonnées, l'ampoule électrique a écarté jusqu'à l'éventualité de la présence des esprits. Mais la technique ne peut rien, pour autant, contre les heures sombres que connaît alors l'Allemagne...
Bloch réhabilite ce que la raison, marxiste entre autres, a voulu condamner : l'existence du mythe. Il défend les archétypes tels qu'ils peuvent apparaître dans les contes, où toute hiérarchie sociale se voit bousculée. De ce pas, il met en garde contre la mécanique, qui gomme la lumière du rêve, alors que le moment utopique y reste encore tapi.

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Didier Moulinier : Eros et Thanatos à l'ère du numérique. Suivi de : Remarques sur le Virtuel

Les Contemporains favoris - Août 2015


C'est un fait que l'on peut considérer comme établi : la poussée du numérique, d'internet, des nouvelles technologies et autres objets communicants est en train de changer profondément non seulement notre rapport au monde et aux autres, mais aussi à nous-mêmes, au corps, au plaisir, à l'intime. Or justement il semble que la prise en compte du plaisir éprouvé dans les environnements numériques subisse encore une sorte de censure faute d'avoir intégré « la table des valeurs et des concepts faisant partie de la culture », comme l'écrivait Gilbert Simondon en son temps à propos des machines. C'est ici que l'outillage conceptuel de la psychanalyse nous est précieux avec ses corrélations telles que principe de plaisir / principe de réalité, pulsion de vie / pulsion de mort, et surtout depuis Lacan la distinction entre plaisir et jouissance, pour tâcher de comprendre ce qu'il en est d'une jouissance du numérique qui ne serait réductible ni à un plaisir inconsistant ni à une addiction mortelle, et qui ne désespérerait pas de la fonction symbolique dans la cité des ordinateurs et des algorithmes. Dans la seconde partie, 'Remarques sur le virtuel', l'on se permet de rappeler quelques fondamentaux sur l'intrication du réel et du virtuel avant d'évoquer non sans ironie quelques-unes des résistances culturelles opposées à la dématérialisation.

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Giuseppe Rensi : Lettres spirituelles d'un philosophe sceptique

Allia - Août 2015


"Prends garde ! Il se pourrait que l'univers soit la proie de lois aveugles, de forces mécaniques vouées au hasard, que rien ne réponde aux exigences de ton esprit ; que par conséquent même ces grandes valeurs spirituelles auxquelles tu as assimilé ton moi, que tu tiens pour éternelles et inéluctablement victorieuses, si ce n'est aujourd'hui, du moins dans le futur, soient au contraire destinées à succomber durant une longue ère historique, voire pour toujours."
Ces lettres nous entraînent dans un véritable voyage philosophique. Chacune d'entre elles nous est adressée par la grâce d'un tutoiement de bon aloi et répond à des interrogations de tous ordres, sur le mystère de la pensée autant que sur notre perception du quotidien. La figure essentielle qui ressort de la philosophie de Rensi, et de ces lettres en particulier, est celle du joueur pariant sur le bien. Et le philosophe n'hésite pas à puiser parfois ses exemples dans la littérature. Telle cette femme pensant immoral de se soumettre à des liens légaux contre les exigences du cœur au point de quitter son mari pour retrouver son amant. Puis elle changea totalement de point de vue et quitta son amant pour retrouver son mari. Ce qui apporta à tous le malheur. Rensi en conclut qu'il faut à tout prix rejeter le devoir être. Les sujets abordés sont aussi universels que particuliers au point de faire oublier le socle philosophique sur lequel repose cette pensée ou, pour mieux dire, cette philosophie de la vie. Des philosophes comme Sénèque, Épictète, Malebranche­, Spinoza, Leopardi ou Platon, ou de grands courants de pensée comme le bouddhisme, sont ici abordés, comme sans effraction, avec la clarté, la passion et la limpidité d’un pédagogue hors du commun.
Traduit de l'italien par Marie-José Tramuta

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samedi 29 août 2015

Fosca Mariani Zini : La calomnie, un philosophème humaniste. Pour une préhistoire de l'herméneutique

Presses Universitaires du Septentrion - Août 2015


La calomnie est la falsification volontaire du discours d'autrui : elle fait dire à quelqu’un ce qu’il n’a pas dit. À la Renaissance, lorsque la grammaire se transforma en philologie, la calomnie devint un « philosophème », l’unité focale d’un réseau de notions et de problèmes, exprimant la nouvelle conscience des écarts entre la pensée, son expression dans une langue historique et sa communication. Contre les lectures fautives, le philologue rétablit le sens authentique des œuvres du passé. Par son pouvoir de miner la crédibilité d’autrui, la calomnie fut également un objet de réflexion politique et religieuse, incitant même Botticelli à en donner une représentation picturale.
Cet essai se propose d’analyser les dispositifs de la calomnie, ainsi que ses effets et ses remèdes, dans ses lieux historiques d’apparition. Ainsi, après avoir examiné l’émergence de la calomnie à la Renaissance, on en étudiera la réélaboration dans la défense de Descartes contre ceux qui l’accusaient d’hérésie. Le problème humaniste de la communication se transforme ici dans celui de la juste compréhension des idées et dans l’examen des passions négatives et les vertus qui les contrecarrent, notamment la générosité. Si ces éléments constituent la préhistoire de l’herméneutique, l’étude de l’herméneutique générale du XVIIe-XVIIIe siècle, visant à contrer les calomnies de l’interprète malicieux, en représente sa première forme. On verra enfin comment la calomnie fut réduite ensuite à la médisance.

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Florent Guénard et Sarah Al-Matary (dir.) : La démocratie à l'oeuvre. Autour de Pierre Rosanvallon

Seuil - Août 2015


Pour comprendre nos sociétés démocratiques toujours en quête d'elles-mêmes, explique Pierre Rosanvallon, il faut articuler l'histoire de l'âge moderne et l'analyse du monde contemporain. Et pour cela inventer la méthode et les outils conceptuels qui permettent à la fois de tirer parti de l'étude du passé et de saisir ce qui nous en sépare. C'est ce à quoi son oeuvre, de L'Age de l'autogestion (1976) à La Société des égaux (2011), n'a cessé de travailler, s'attachant à mesurer les évolutions de notre temps et à saisir ce qui peut permettre aux promesses de liberté et d'égalité d'être tenues. La démarche est originale, en grande partie inclassable et incontestablement féconde. Elle convoque une pluralité de savoirs, invite les disciplines à dialoguer, appelle la discussion. C'est à cette intention que répond le présent ouvrage, tiré du colloque de Cerisy qui s'est tenu en septembre 2014 autour de l'oeuvre de Pierre Rosanvallon. Réunissant historiens, sociologues, politistes, philosophes, il se veut à la fois une réflexion sur la singularité d'un travail dont les effets sont sensibles dans le monde intellectuel, et une discussion des thèses autour desquelles l'oeuvre de celui-ci se structure.

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Jean Canteins : Arnau de Villeneuve I. Un « spirituel » soupçonné d'hérésie

Les Belles Lettres - Août 2015 - L'âne d'or


Médecin et maître spirituel célèbre en son temps (France, Italie et Espagne, deuxième moitié du XIIIe siècle), Arnau de Villeneuve, protégé par les papes Boniface VIII et Clément V qu'il avait guéris de maladies douloureuses, a subi après sa mort une éradication aussi systématique que possible de toutes traces de ses écrits par ses adversaires. Théologien de talent versé dans l alchimie et l astrologie, il devient rapidement un maître spirituel très écouté, prophétisant le retour de l Antéchrist et la fin des temps. Ne reconnaissant qu une autorité « singulière », la sienne, ainsi que celle de toute personnalité individuelle, il conteste celle des institutions, dénonce les maux du siècle et désigne les coupables. Rapidement inquiété par les tribunaux, suspecté d hétérodoxie et d hérésie, il ne doit son salut qu à sa réputation de médecin. Prévoyant de son vivant que tout ce qui pourrait être jeté au feu de ses écrits le serait, il a développé une puissance peu commune de « publication littéraire », son organisation éditoriale de grande envergure permettant à certains de ses traités une large diffusion... et leur survie partielle.

Jean Canteins, dans ces deux volumes construits en trois parties, dresse tout d abord le panorama de la vie exceptionnelle et de l uvre d Arnau de Villeneuve tenant compte des derniers acquis de la recherche. Il a privilégié dans la deuxième partie la traduction des traités « catalans » qui ont subsisté, à l authenticité reconnue et ayant l avantage d offrir sous une forme concise un aperçu assez complet des thèmes développés dans les multiples textes latins dont l attribution reste, elle, encore douteuse pour certains. Enfin la troisième partie ébauche le répertoire des hommes et des femmes qui ont reçu, connu ou pris en considération le message arnaldien.

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Gloria Origgi : La réputation

PUF - Août 2015


Comme une réputation se fait-elle ou se défait-elle ? Les raisons d'un anonymat prolongé ou d'une célébrité fulgurante, de la dégradation ou de l'amélioration de notre image, la plupart du temps nous échappent. Pourtant, la réputation traverse de part en part nos vies. D'un côté, nous nous soucions tant de notre propre image qu'il nous arrive de commettre des actes inconsidérés dans le vain espoir de maîtriser l'opinion que les autres ont de nous. 
D'un autre côté, nous nous fions nous-mêmes tant à la réputation des autres que nous pouvons être amenés à choisir sur sa seule foi un médecin, un élu politique, un journal, voire à adopter une idée. C'est que la réputation touche au plus intime de notre existence. Or cette notion essentielle a été étrangement négligée par les sciences sociales, qui n'ont longtemps vu en elle que le vestige d'une société traditionnelle et anti-individualiste où la fama, l'honneur et la lutte pour le prestige jouaient un rôle central que la modernité n'a eu de cesse de démanteler. Jamais pourtant la réputation n'a été plus cruciale que dans nos sociétés contemporaines.

Gloria Origgi, philosophe, est chercheur au CNRS à l'Institut Nicod. Ses travaux relèvent principalement de la philosophie des sciences sociales et de l'épistémologie. Elle est l'auteur de Qu'est-ce que la confiance ? (Vrin, 2008).

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