samedi 4 juin 2016

Archives de Philosophie (Tome 79, numéro 2) : La philosophie russe et le positivisme - Personne et subjectivité

Centre Sèvres - Juin 2016



Un dossier La philosophie russe et le positivisme d’une part, un ensemble Personne et subjectivité d’autre part ?Serait-ce hétérogène et juxtaposé, parce que lié à des contextes assez éloignés ?

Dans le dossier sur la philosophie russe, il s’agit bien d’une crise de la pensée. La tradition orthodoxe, la littérature, la construction politique, la jeune histoire de la philosophie russe vivent en effet, au XIXe siècle, le choc du positivisme d’Auguste Comte – objet en Russie d’un accueil étonnant par bien des aspects. Ce choc ébranle. En outre, à la différence de la philosophie de l’Europe occidentale déployée depuis l’antiquité grecque la plus lointaine jusqu’à l’émergence du positivisme comtien, le monde ancien de la philosophie russe voit essentiellement le jour avec l’idéalisme allemand, accueilli en même temps que discuté et critiqué par les penseurs russes.

En ce sens, Vladimir Soloviev, Boris Tchitchérine, Piotr Lavrov, traduits ou commentés ici, sont des témoins majeurs et décisifs, en même temps que critiques, de l’irruption du positivisme dans le monde russe de leur temps et de ses effets annoncés, sinon aperçus, sur le devenir de la société et de l’idée même de sujet – comme ne manquera pas de le montrer l’histoire ultérieure.

En philosophie européenne occidentale, la phénoménologie, en formalisant sa prise de position par rapport au positivisme scientifique – et, d’une certaine façon, par rapport aux autres positivismes, dont celui de l’empirisme psychologique –, porte en sa pleine lumière une autre crise : celle de la dissolution du sujet et de la déconstruction de la personne. La philosophie, que ce soit chez un Merleau-Ponty ou chez un Ricœur, relance alors, à partir de la phénoménologie dans le passage du XIXe au XXe siècle, la question toujours actuelle de la subjectivité et de la personne en son individualité, que Kant avait ouverte sans jamais chercher à la conclure – ni le prétendre –, remettant à la philosophie à venir le soin de ne jamais la déserter.

Par-delà des contextes éloignés

Dans la Russie de leur temps, le rapport critique de Soloviev, Tchitchérine et Lavrov au comtisme et la prise de distance qui s’en dégage ne sont pas sans résonnances avec l’attention portée par la philosophie européenne occidentale à la subjectivité et à la personne, dont il faut prévenir la disparition sous les assauts des positivismes multiples et toujours récurrents. En ce sens, par-delà des contextes assez éloignés, c’est un même esprit de la philosophie historiquement en travail qui se montre, tant dans ses débats avec elle-même que dans les résolutions de ces débats qu’elle cherche, infiniment.

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