Donné à l’Université de Fribourg durant le semestre d’été 1927, ce cours compte parmi les derniers de la longue carrière académique de Husserl. Sous le titre général « Nature et esprit », il y poursuit sa recherche anti-naturaliste, engagée dès le début des années 10, d’un critère sûr de distinction et d’articulation des sciences de la nature et des « sciences de l’esprit ». À cet égard, l’originalité de ce cours est double : on y trouve non seulement une réflexion approfondie, à la fois ontologique et épistémologique, sur le sens philosophique de l’idée d’une classification des sciences débouchant sur la proposition de plusieurs classifications possibles, mais également l’élaboration d’une fondation philosophique des sciences positives par un retour méthodique aux structures du monde de l’expérience préscientifique. C’est donc toute la phénoménologie husserlienne tardive du « monde de la vie » qui s’esquisse pour la première fois dans ce cadre.
Chemin faisant, Husserl est amené à se confronter aux autres courants philosophiques animés par cette ambition de fondation : la pensée de Dilthey, et à travers elle la « philosophie de la vie », mais aussi et surtout le néokantisme de l’école de Heidelberg, dont une critique inédite et détaillée est exposée dans ces pages. Retournant contre Windelband et Rickert la référence à Kant et l’idée d’une déduction transcendantale, Husserl donne les moyens à la phénoménologie de se revendiquer comme une « philosophie scientifique de la vie », articulant sans contradiction un intuitionnisme de principe et une confiance renouvelée dans la raison.
Véritable carrefour de la pensée husserlienne, ces leçons contribuent à donner une idée de ce « système » auquel il est arrivé à Husserl d’avouer qu’il aspirait, en même temps qu’elles fournissent des thèses et des arguments susceptibles de nourrir la réflexion, toujours contemporaine, sur le programme naturaliste.
Traduction et présentation par Julien Farges.
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