jeudi 29 septembre 2011

Le nombre et la sirène

Quentin Meillassoux

9782213665917

Septembre 2011 – Fayard – “Ouvertures” – 19 €

Un coup de dés jamais n’abolira le hasard est composé par Mallarmé, dans sa version finale, en 1898, l’année même de sa mort. Le poème constitue l’une des ruptures littéraires les plus radicales de la modernité : lignes éclatées sur tout l’espace de la double page, jeu sur la taille des caractères empruntant au procédé des affiches, multiplication des incises qui déroutent la lecture. Mais son énigme la plus profonde tient peut-être à son contenu : une intrigue, à peine suggérée, dont le sens, l’étrangeté continuent aujourd’hui d’échapper à une pleine élucidation. L’hypothèse de Quentin Meillassoux consiste à affirmer que Mallarmé a caché dans son poème un mètre secret, un Nombre unique, qui devait permettre de réinventer une poésie à la fois moderne et toujours liée à l’antique règle du décompte. Une investigation est alors menée, qui tient à la fois de l’étude littéraire, de la chasse au trésor et de l’enquête policière à la Edgar Poe. On y découvre progressivement que le Nombre n’est autre que la somme des mots du poème et que cette idée – apparemment fantaisiste – devait pourtant être à la source, pour Mallarmé, d’un geste poétique révolutionnaire et d’une rigueur sans pareille.

vendredi 23 septembre 2011

Rousseau, politique et esthétique. Sur la lettre à d'Alembert

Blaise BACHOFEN

98222100376100L

Septembre 2011 – ENS Editions - La croisée des chemins – 25 €

Lorsque l'article Genève paraît dans l'Encyclopédie, Rousseau publie une Lettre à d'Alembert sur son article Genève, réponse foisonnante et virulente qui traite aussi bien du clergé, des moeurs, de l'honneur, des lois, que des spectacles ou des divertissements qui conviennent au peuple genevois.
Pourquoi prend-il ces questions tellement à cœur ? En dépit de ses origines genevoises revendiquées, on ne lui a pas confié la rédaction de l'article. D'Alembert, en s'en chargeant personnellement, sait qu'il attise une polémique. Son Discours préliminaire de l'Encyclopédie visait déjà à réfuter le Discours sur les sciences et les arts. L'article sur Genève présente la cité calviniste comme un exemple de liberté politique et religieuse mais critique des restes d'obscurantisme que la lumière philosophique doit dissiper : il suggère des réformes, notamment la levée de l'interdiction d'un théâtre permanent.
D'Alembert imagine ce qu'il nomme une "cité philosophe", où fleuriraient à la fois la liberté de la république et les raffinements culturels des grandes monarchies. Or ce projet résume tout ce que Rousseau, depuis le premier Discours, dénonce comme une illusion. Sa Lettre approfondit la démonstration : le théâtre comme école de l'hypocrisie, le bel esprit, la civilité telle qu'on la conçoit à Paris sont inconciliables avec les moeurs de véritables citoyens.
Ses thèses sur les spectacles ne sont qu'un aspect de sa réflexion sur la modernité : à quelles conditions la république est-elle possible ? Comment lier adéquatement morale, esthétique et politique ? Les études réunies dans ce volume éclairent les enjeux et les logiques complexes d'un texte que son auteur, alors malade et croyant vivre ses derniers jours, a rédigé comme s'il devait s'agir de son testament philosophique.

Les paradoxes de l’empathie. Philosophie, psychanalyse, sciences sociales

Sous la direction de Patricia Attigui et Alexis Cukier

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Septembre 2011 - CNRS Alpha – 35 €

Pourquoi, après des décennies de critique, de discrédit, voire d’ignorance, l’empathie connaît-elle aujourd’hui un regain d’intérêt théorique en philosophie, en psychanalyse et en sciences sociales ? C’est à cette question que cet ouvrage collectif souhaite répondre en interrogeant les recherches contemporaines sur l’empathie à partir de ses paradoxes théoriques, cliniques et moraux : une compréhension d’autrui à la fois affective et cognitive, identificatoire et sélective, automatique et inégalement distribuée. En examinant les perspectives récemment ouvertes qui montrent l’empathie sous un jour nouveau, en prenant en compte la complexité de son histoire et de ses modèles, la diversité de ses pratiques et de ses usages, les auteurs proposent des analyses originales qui la remettent au cœur d’une dialectique de l’affectivité et de la représentation, de l’intersubjectivité et des rapports sociaux, de l’expérience individuelle et de l’expérience sociale. Cet ouvrage s’appuie sur des rencontres et des programmes de recherche pluridisciplinaires qui renouvellent l’approche de l’empathie, en examinent les mécanismes, les usages et la portée dans les sciences sociales, la philosophie morale et sociale, et la psychanalyse. Il constituera un instrument irremplaçable de découverte, d’approfondissement et de critique d’une notion qui a enfin trouvé toute sa place dans la pensée contemporaine.

mercredi 21 septembre 2011

Cyborg philosophie. Penser contre les dualismes

Thierry Hoquet

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Octobre – Seuil – 24 €

Cyborg hante la culture contemporaine, au cinéma (Robocop, Terminator) ou dans les mangas.
Il s’incarne dans les sportifs dopés, dans les prothèses médicales et dans les fantasmes d’« humanité augmentée », voire immortelle. Mais Cyborg est aussi, et surtout, une figure philosophique. Cet hybride d’organisme et de machine bouleverse en effet les dichotomies fondamentales de notre pensée : nature/artifice, humain/non-humain nature/culture, masculin/féminin, normal/pathologique, etc. À partir d’une lecture personnelle des travaux de Georges Canguilhem et de Donna Haraway, Thierry Hoquet explore, dans ce texte très original par sa forme et son style l’énigme de cette figure : Cyborg est-il un instrument susceptible de nous conduire vers une humanité libérée des dualismes, colombe platonicienne rêvant d’un ciel sans air, où elle pourrait voler plus librement ? Ou, au contraire, marque-t-il notre asservissement à un système technique de contrôle et d’oppression, est-il l’incarnation d’une humanité perdue dans le cliquetis mécanique de l’acier ? Penser philosophiquement Cyborg, c’est réfléchir sur les rapports de la machine et de l’organisme et sur la possibilité de les composer.
Mais Cyborg invite aussi à penser la différence des sexes en rapport avec la nature et la technique : Cyborg est-il le neutre ou l’androgyne, ou propose-t-il une autre manière d’articuler le masculin et le féminin ? On l’a compris, Cyborg vient troubler la philosophie. Il décrit notre condition et ses, insolubles ? contradictions.

Le possible et le réel

Henri Bergson

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Octobre 2011 – PUF – Quadrige – 8 €

Bergson a marqué l'importance de certains de ses " essais et conférences ", en les rassemblant dans deux recueils : L'énergie spirituelle en 1919, La pensée et le mouvant, en 1934.
Il faut donc tout à la fois replacer ces écrits dans ses recueils (et dans l'ensemble de son œuvre) et les lire pour eux-mêmes. Dans Le possible et le réel (1920), Bergson propose une distinction qui change tout : le " réel " dépasse, il précède même un " possible " que nous nous représentons en fait, seulement, après coup ; il actualise, en revanche, des virtualités qui sont le temps, la vie, la durée même ; l'illusion rétrospective, la création imprévisible, l'une et l'autre essentielles à notre vie, voilà ce qui se joue ici, dans ce texte précis, juste après la guerre.

Philosophies et pensées pour notre temps

Collectif

4

Septembre 2011 - Sciences Humaines Editions – 10 €

Depuis vingt ans, le monde change de peau : révolution du numérique, crise et bouleversements économiques, nouvel ordre géopolitique.
En deux décennies, le monde a basculé dans l’ère de la globalisation. Alors qu’en1992, Francis Fukuyama annonçait « la fin de l’histoire », celle-ci, au contraire, s’accélère et métamorphose le monde dans lequel nous vivons. Les sciences humaines se font l’écho de ces bouleversements, en tâtonnant parfois mais aussi en créant de nouveaux concepts, réinterprétant de vieilles idées, tentant des rapprochements novateurs.
Penser le nouvel ordre (ou désordre) du monde, tant sur le plan géopolitique qu’économique, comprendre les conséquences de la mondialisation sur les identités culturelles, repenser les cadres institutionnels, nationaux et internationaux, trouver de nouvelles métaphores ( flux, réseaux, risques…) pour saisir la nature des liens sociaux dans un monde perçu comme fluide et indéterminé, repenser les inégalités mais aussi les relations entre les individus, saisir la marche des civilisations, leur choc ou leur déclin, réinventer les rapports de l’homme avec la nature… autant de thèmes qui irriguent la pensée contemporaine.
Ce livre donne la parole à tous ceux, philosophes, sociologues, historiens, géographes économistes, politistes ou anthropologues, dont la pensée contribue à éclairer notre temps.

Stanley Cavell, le cinéma et le scepticisme

Elise Domenach

3

Septembre 2011 – PUF – 12 €

Ce livre parcourt les trois premiers livres philosophiques de Stanley Cavell (Dire et vouloir dire, La projection du monde et Sens de Walden) à la recherche des " catégories nouvelles " lui permettant de construire une " esthétique ordinaire " capable d'exprimer notre scepticisme, et non plus de s'en détourner ou de le répudier.
Sa nouvelle réponse au scepticisme engage centralement la lecture d'œuvres d'art modernistes (pièces de théâtre, œuvres musicales, sculptures, peintures) et de films hollywoodiens et avant-gardistes où Cavell trouve des dépassements exemplaires de la tentation sceptique de succomber à la perte d'efficace des conventions traditionnelles, des manières nouvelles d'exprimer ce qui importe pour nous. Dans cette esthétique ordinaire, le cinéma joue un rôle privilégié : il nous apprend à reconnaître notre " scepticisme ordinaire ", et nous réconcilie avec le monde et les autres.

Sartre et le marxisme

Emmanuel Baro (dir.)

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Septembre 2011 – La Dispute – 30 €

La pensée et les interventions politiques de Jean-Paul Sartre, compagnon de route puis critique hétérodoxe du PCF, proche des jeunes maos après 1968, soutien indéfectible des mouvements anticolonialistes, ont durablement marqué l'espace intellectuel français.
Mais leur actualité tient d'abord au fait que le philosophe s'est attaqué à des questions toujours décisives pour tous ceux qui se demandent ce qu'être révolutionnaire aujourd'hui peut vouloir dire. Questions théoriques et politiques : qu'est-ce que le travail, l'idéologie, l'aliénation ? L'histoire est-elle toujours celle du primat des forces matérielles ? Qu'est-ce qu'une classe ? Mais aussi tactiques et stratégiques : que retenir des socialismes "réels" ? Faut-il ou non soutenir la gauche réformiste, voter aux élections ? Peut-on se passer de la violence en politique ? Le marxisme est "indépassable parce que les circonstances qui l'ont engendré ne sont pas encore dépassées" affirmait Sartre en 1957.
En ce XXIe siècle où le règne du capitalisme est aussi féroce qu'avant, où l'actualité montre que les peuples ont toujours à batailler rudement pour se réapproprier leur destin, ses analyses critiques, jamais indépendantes des situations concrètes, ont encore beaucoup à nous apprendre. Cet ouvrage collectif, qui allie contributions de philosophes et d'historiens, analyse les rapports variés de Sartre aux principaux courants du marxisme, à certaines de ses figures les plus emblématiques, et à ses concepts théoriques et politiques les plus cruciaux.

Dans quels mondes vivons-nous ?

Aurélien Barrau et Jean-Luc Nancy

9782718608532FS

septembre 2011- Galilée – Collection : la philosophie en effet – 26 €

« Dans quel monde vivons-nous ? » : le plus souvent, dans cette question, le point d’interrogation vaut autant qu’un point d’exclamation.
Elle sonne à la fois sur le mode de la révolte et sur celui de la résignation. Dans l’usage ainsi fait du mot, ou de l’idée, de « monde » se cache la valeur la plus forte qu’on puisse lui attacher : celle du cosmos, ensemble harmonieux des corps célestes dont les orbes portent les rapports de l’ordre universel, c’est-à-dire tourné vers une unité intégrale. C’est le sens et le balancement de cet ordre et de cet un qui se trouvent donc implicitement interrogés par cette question.
Il se trouve qu’aujourd’hui l’expérience, tant scientifique qu’existentielle, du monde déjoue la postulation « cosmique » dans laquelle la pensée semblait inévitablement devoir se déployer. D’une part, le monde-cosmos est éclaté ou désuni ; d’autre part, l’idée même de « monde » (un, ensemble) ne répond plus ni à l’investigation physique ni à l’interrogation métaphysique : « plurivers » ou « multivers » sont à l’ordre du jour des physiciens tandis que « multiplicité » et « multitude » traversent les sociologies autant que les ontologies.
En un temps où nous disons simultanément que le monde est toujours plus « globalisé » (donc unifié) et que nos modes de vie, de culture sont toujours plus hétérogènes, il faut remettre en chantier cette question : nous continuons à nous considérer comme vivant dans un monde alors qu’il n’est plus certain que nous puissions user encore de ces termes. Nous ne sommes plus ni « dans » ni « devant » le monde, mais celui-ci dérobe et déporte de manière vertigineuse la consistance de sa réalité « en soi ».
Et peut-être ne vivons-nous pas plus dans un monde ou dans plusieurs mondes que le ou les mondes ne se déploient, divergent ou se recoupent en nous et par nous.

lundi 19 septembre 2011

La Lecture insistante. Autour de Jean Bollack

Colloque de Cerisy

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Septembre 2011 – Albin Michel – Bibliothèque des Idées – 25 €

Né en 1923, Jean Bollack est un des plus grands philologues de notre époque, également très connu pour ses travaux sur le théâtre, la psychanalyse et la philosophie grecque. Les textes rassemblés dans ce volume témoignent d’une rencontre entre des chercheurs d’horizons et de disciplines diverses. La raison de cette rencontre est d’abord celle d’une convergence de méthode : l’herméneutique critique (les œuvres sont à la fois sources de sens et parties prenantes de l’histoire intellectuelle qui les a produites) dont Jean Bollack et Heinz Wismann ont été les premiers à révéler la fécondité dans le domaine de la philosophie antique – présocratique, notamment. Si J. Bollack a pu tester cette méthode dans un domaine relativement circonscrit –Hésiode, Héraclite, Empédocle, les tragiques grecs, Épicure–, il importait d’étendre le champ de son application à des œuvres d’époques et de genres différents : littérature, poésie, textes sacrés, peinture, et d’asseoir sa validité dans une perspective plus théorique en la justifiant du point de vue des théories du langage, de l’interprétation et de la critique esthétique. Cet ouvrage offre aux lecteurs la possibilité de revisiter des textes souvent très connus (Genèse, Homère, Œdipe roi, Molière, Madame Bovary, Rimbaud, etc.) sous un angle qui en rénove la réception.

vendredi 16 septembre 2011

Fondements à une anthropologie des hommes

Albert Piette

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Juillet 2011 – Hermann – 25 €

Qu’est-ce que l’anthropologie ? Elle est rarement pensée comme une discipline distincte des sciences sociales. Dite ou sous-entendue « sociale et culturelle », elle en a assimilé les principaux schèmes d’intelligibilité. Après avoir cerné les traits essentiels de l’opération sociologique, après une critique des enquêtes ethnographiques, ce livre entend attribuer à l’anthropologie le statut d’une discipline à part entière avec un objet et des méthodes spécifiques. C’est l’homme, l’individu existant, qui est l’objet de l’anthropologie enfin posée et théorisée comme une science des hommes avec leurs caractéristiques sociales et culturelles mais aussi au-delà ou en deça de celles-ci. Les méthodes consistent alors à se rapprocher des individus pris séparément et non plus collectivement, pour les suivre dans la continuité des situations et des instants de l’existence. C’est dans cette continuité que les hommes rencontrent en situation des institutions, des dieux ou des animaux : ils sont aussi présents en situation. Albert Piette trouve dans l’ontologie un fondement théorique à la constitution de l’anthropologie comme discipline autonome, une science des individus humains et non humains.

Désastres. Cahiers d'anthropologie sociale n°7

Dirigé par Barbara Glowczewski et Alexandre Soucaille

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Septembre 2011 – L’Herne – 15 €

Pensée du désastre, penser le désastre, que pourrait être la tâche de l’anthropologie en ce lieu déraisonnable ? Les contributions rassemblées dans ce volume interrogent chacune les plis d’une rupture, la présence constante d’une déchirure, tenant ensemble simultanément l’épuisement du désastre et la création nécessaire à la survie, à la possibilité d’une vie en commun.
Certaines d’entre elles concernent plus spécifiquement la question du savoir et de ses modalités de connaissance : Quelle place a pris ou devrait prendre le désastre dans la construction du savoir anthropologique ? Quelle anthropologie peut émerger des polyphonies propres au désastre, victimes, persécuteurs, décideurs, observateurs? Que ce soit pour penser les formes de résistance aux désastres naturels, sociaux ou politiques, l’après shoah, les coulées de boue au Venezuela et les inondations en France, ou la question du viol, notamment en Inde.
D’autres s’attachent à un problème d’articulation, de la pensée du désastre et de la pensée conservatrice, du bouleversement radical et de son assise sociale ; articulation qui entraîne vers une désarticulation, vers cette rationalité au plus près de la déraison, opposée à la raison commune. Les ressorts créatifs des productions testimoniales, quelles que soient leurs formes, font émerger de nouvelles praxis :  communauté de lépreux en Inde ou encore théâtre d’usagers psychiatriques au Brésil, etc.
Les extraits du journal de l’écrivain Elisabeth Inandiak nous plongent au cœur des remous sociaux et de la réinvention quotidienne des sinistrés des nuées ardentes du volcan Merapi, à Java en 2010.  

Contributeurs : Salvatore D’Onofrio, Barbara Glowczewski, Elisabeth D. Inandiak, Julien Langumier, Clotilde Lebas, Fabienne Martin, Peter Pal Pelbart, Sandrine Revet, Alexandre Soucaille.

samedi 10 septembre 2011

La Pensée-paysage. Philosophie, arts, littérature.

Michel Collot

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Septembre 2011 – Actes Sud – 25

Le développement rapide qu’ont connu les sociétés et les économies occidentales depuis la seconde guerre mondiale s’est accompagné d’un exode rural, d’une urbanisation massive et d’une dégradation de l’environnement qui pouvaient donner à penser qu’elles avaient perdu de vue le paysage. Et celui-ci semblait même avoir perdu la place qu’il avait conquise au XIXe siècle dans l’art et la littérature, de plus en plus tentées au XXe par l’abstraction et le formalisme. Or c’est au moment où il semblait ainsi menacé de déclin voire de disparition que le paysage a fait l’objet d’une attention nouvelle dans tous les domaines de la vie sociale, intellectuelle, littéraire et artistique. Tout se passe comme si nos sociétés avait pris soudain conscience de la valeur des paysages que leur croissance risquait de détruire.

L’intérêt qui se manifeste depuis quelques décennies pour le paysage n’est pas seulement une mode ni même un « phénomène de société », mais un véritable fait de civilisation, qui correspond à une évolution profonde des mentalités. En réaction contre la tendance à l’abstraction caractéristique du « mouvement moderne », il manifeste le besoin de renouer avec l’environnement et avec l’expérience sensible. Or cela suppose de réformer non seulement nos manières de faire et de vivre, mais notre façon de penser. Le paysage n’est pas seulement un terrain d’action ni un objet d’étude : il donne à penser, et à penser autrement. Il nous propose, entre autres choses, un modèle pour l’invention d’un nouvelle forme de rationalité, que Michel Collot propose ici d’appeler la pensée-paysage, et qu’il tente de définir et d’illustrer à travers ses expressions philosophiques, artistiques et littéraires contemporaines, en faisant dialoguer notamment poésie et phénoménologie, orient et occident, plasticiens et écrivains, tradition et modernité.

vendredi 9 septembre 2011

Lectures et interprétations des Essais de théodicée de G. W. Leibniz

Paul Rateau (dir.)

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Septembre 2011 - Franz Steiner Verlag – 42 €

En 1710 paraissaient à Amsterdam les Essais de Théodicée, sur la bonté de Dieu, la liberté de l'homme et l'origine du mal, seul ouvrage philosophique d'importance publié du vivant de Leibniz. En dépit de sa notoriété, ce livre, souvent considéré comme un exposé «populaire» et non véritablement systématique de la philosophie leibnizienne, a rarement été étudié en lui-même et pour lui-même. L'objet des études réunies dans ce volume est de montrer son originalité et son importance théorique, par les questions et les thèmes qui y sont traités. Le premier chapitre examine les présupposés et les implications de la thèse de la création divine du meilleur monde possible. Le second aborde l'ordre naturel et le statut du corps dans le cadre général de l'hypothèse de l'harmonie préétablie. Le troisième est consacré au problème de la liberté et du mal, le quatrième au rapport entre foi et raison et à la question des miracles. Le dernier chapitre envisage les enjeux pratiques, religieux et politiques des thèses développées dans la Théodicée (la réunion des Églises, les relations entre les États).

Sommaire

Présentation

Paul Rateau: Les Essais de Théodicée : un ouvrage « populaire » ?

I. Le choix divin du meilleur monde possible : compossibilité, nécessité morale et concours

Hans Poser : Wahrheit, Möglichkeit, Kompossibilität. Die komplexe Basis der Theodizee-Argumentation

Paul Rateau : Ce qui fait un monde. Compossibilité, perfection et harmonie

Jean-Pascal Anfray : Leibniz, le choix du meilleur et la nécessité morale

Francesco Piro : L’action des créatures et le concours de Dieu chez Leibniz : entre trans-créationnistes et durandiens

II. L’ordre naturel : substances, action et corps

François Duchesneau : Autonomie des âmes et devenir des corps dans les Essais de Théodicée

Arnaud Pelletier : Substance, corps et phénomène dans la Théodicée. Avec une note inédite de Leibniz sur Bayle

Anne-Lise Rey : L’ambivalence de l’action libre : des corps physiques aux créatures

III. La liberté et la question du mal

Enrico Pasini : La doctrine de la spontanéité dans la Théodicée

Gianfranco Mormino : La contingence dans les Essais de Théodicée de Leibniz : un réquisit de la liberté ?

Agustín Echavarría : Leibniz’s concept of God’s Permissive Will

Juan Antonio Nicolás : Le mal comme limite du Principe de raison

IV. Foi, raison et miracles

Maria Rosa Antognazza : The Conformity of Faith with Reason in the "Discours Préliminaire" of the Theodicy

Michel Fichant : Vérité, foi et raison dans la Théodicée

Frédéric de Buzon : Les miracles dans la Théodicée : usage dogmatique et usage polémique 

V. Irénisme et politique

Claire Rösler : L’influence du negotium irenicum (1697-1706) entrepris par G. W. Leibniz et D. E. Jablonski sur la Théodicée

Catherine Wilson : Leibniz and the Good World

lundi 5 septembre 2011

Qu’est-ce qu’une règle ?

Jean-Pierre Cometti

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Septembre 2011 – Vrin – Coll. « Chemins Philosophiques » – 8 €

Les représentations auxquelles la notion de règle est associée déterminent pour une large part notre approche de toutes sortes de questions propres à la sphère de la rationalité, de la logique, de la morale ou du droit. On appelle règle un principe supposé diriger le raisonnement ou la conduite; la signification en est fondamentalement normative, que la fin en soit le vrai ou juste, quelque place qu’elle occupe dans le vaste champ des valeurs.
Historiquement, dans l’histoire de la philosophie tout au moins, cette représentation de la règle trouve sa contrepartie dans la contingence qui semble frapper l’empiricité; elle s’illustre, pour la pensée moderne, dans l’opposition, d’apparence insurmontable, du « est » et du « dois ». Sous ce rapport, la question des règles constitue une question cardinale, et la philosophie peut être considérée comme une science normative, en ce sens du moins qu’elle ne peut statuer que sur des normes et non pas sur des faits, lesquels relèvent de la science empirique qui, elle-même, ne peut s’en remettre à la seule « expérience ». La métaphysique, autant que les entreprises fondationnelles trouvent leur source et leur justification dans cette opposition et dans les conséquences qui en ont été tirées. C’est dire toute l’importance de la notion de règle, de ce qu’elle recouvre et de l’idée que nous sommes autorisés à nous en faire. La portée n’en est toutefois pas exclusivement théorique ou métaphilosophique. Elle touche à la question plus générale des normes, du langage, et de ce qui se trouve ainsi impliqué dans les situations d’apprentissage, tant d’un point de vue technique que psychologique ou social. C’est à débrouiller une partie de ces questions que ce petit ouvrage est consacré, dans une perspective de clarification qui vise à soustraire la règle à sa hauteur, c’est-à-dire à toute vision qui tend à la dissocier de ses applications.

L'homme total : Sociologie, anthropologie et philosophie chez Marcel Mauss

Bruno Karsenti

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Août 2011 – Bruno Karsenti – 24 €

L'homme total, tel est l'horizon d'une « science de l'homme » à la fois théorique et empirique, à laquelle Marcel Mauss a voulu donner ses assises par une conception renouvelée du symbolique et de son efficacité propre. Rectifiant la conception durkheimienne du social comme structure de coercition du sujet, Marcel Mauss a refondé la sociologie comme anthropologie générale. De l'existence d'un lien très particulier entre sociologie, philosophie et anthropologie, l' oeuvre de Mauss constitue l'un des meilleurs témoins. Son oeuvre est ainsi devenue la source de tous les développements contemporains qui, en France, alimentent la réflexion à propos de l'objet des sciences humaines.
Pour expliquer la productivité exceptionnelle de cette oeuvre, Bruno Karsenti remonte les fils d'une généalogie intellectuelle qui traverse toute la philosophie, la sociologie et la psychologie françaises des XIXe et XXe siècles, en évaluant l'effet des révolutions de pensée du langage, de la culture et de l'inconscient. Il montre comment s'est cristallisé le projet d'une critique des abstractions disciplinaires, qui font éclater l'unité du « phénomène social total », et d'un dépassement des dualismes de l'individuel et du collectif, du logique et de l'affectif, du normal et du pathologique.

Cahiers de philosophie

Gustave Courbet

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Édition établie et présentée par Roger Bruyeron

Septembre 2011 – Hermann – 20 €

Contrairement à une légende tenace – en grande partie entretenue par le peintre lui-même – Courbet ne fut ni un esprit fruste et fier de son manque de culture ni un homme incapable de comprendre les débats théoriques qui ont animé son époque, et pas seulement dans le domaine de la peinture.
Ce dont témoignent ces Cahiers conservés dans les archives du Musée national de l’Éducation de Saint-Aignan, c’est que l’élève Courbet a bien reçu, de bon ou de mauvais gré, une culture classique complète (littérature, langues anciennes, le latin surtout, etc.) qui s’est achevée avec le cours de philosophie.
Pendant l’année scolaire 1837-1838, Courbet a écouté le cours de Charles Bénard, jeune agrégé de philosophie, disciple de Victor Cousin, a pris des notes et les a complétées après le cours, comme le lui demandait son professeur. Même si cela ne fut pas de son goût, Courbet a été initié à la philosophie par la pensée éclectique qui régnait alors. Et si la pensée de Courbet s’est orientée bien différemment par la suite, nous pensons que ces leçons ont au moins permis, au peintre comme à l’homme, de comprendre les débats de son temps, voire d’y participer pleinement.
La publication de ces textes, outre qu’elle enrichira la perception que nous pouvons avoir du peintre en dépassant l’image que l’histoire en donne ordinairement, suscitera, nous l’espérons, la curiosité et l’intérêt de ceux pour qui l’enseignement de la philosophie doit achever la formation des élèves dans la classe terminale : ils verront que l’esprit du programme de 1832 n’est pas très éloigné de celui de 2003, dernière réforme en date. Ils y trouveront matière à conforter leur conviction : la nécessité d’un tel enseignement, à ce moment-là de leurs études, pour les futurs étudiants de l’enseignement supérieur.

samedi 3 septembre 2011

Citoyen sujet et autres essais d'anthropologie philosophique

Étienne Balibar

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Septembre 2011 – PUF – 32 €

Qu'appelons-nous « modernité » ? Cette question est travaillée selon une triple orientation philologique, épistémologique et historique, en prenant pour fils conducteurs l'auto-énonciation du sujet, la constitution du « nous » communautaire, l'aporie de l'institution judiciaire. L'interprétation défendue pose que les processus opposés du devenir-citoyen du sujet et du devenir-sujet du citoyen en viennent à se recouvrir. C'est aussi le moment où le rapport du commun à l'universel devient un écart politique au sein de l'universel lui-même. Le « jugement des autres » doit être rapporté à un « jugement de soi-même » attestant pour chacun sa propre normalité. Dès lors, l'humain ne peut coïncider avec l'institution du politique qu'à la condition de se retrancher de soi-même, dans la forme des « différences anthropologiques ». Le citoyen-sujet ne peut se comprendre indépendamment de son envers, qui le conteste et le défie.