Valérie Gérard
Avril 2011 - PUF, Paris - Collection Pratiques théoriques – 20 €
L'expérience morale est immédiatement expérience politique. Car le monde peut rendre l'interrogation morale insensée ; il peut empêcher de vivre en accord avec soi-même, affaiblissant le sentiment d'exister. Individualiser les questions morales, c'est moraliser, souvent avec violence, des vies ainsi abstraites de leurs conditions sociales et politiques.
Pour ne pas faire de la pensée morale un instrument de normalisation, il convient de partir de l'extériorité de la vie humaine : c'est hors de soi que se trouvent les conditions d'un rapport moral à soi - qui est alors précaire. Accorder un sens à l'examen de sa propre vie, à l'attention au réel et au monde : cette disposition - qui se révèle le socle du sens moral - est relationnelle et mondaine. La réflexion éthique ne saurait assurer une vie sensée, prémunie contre la contingence.
Penser l'expérience morale, c'est alors comprendre pourquoi les hommes valorisent une telle réflexion, qui ne leur permet aucune maîtrise et qui ne dépend pas d'eux. La « philosophie morale » qui s'y essaie est d'emblée une philosophie sociale renouvelant les rapports entre la morale et la politique. D'une part, exercer un jugement moral autonome a des conditions extérieures ; d'autre part, un lien apparaît entre la destruction politique et la dépossession morale : il semble indiquer un rapport entre existence politique, puissance de vie, exigence morale et responsabilité pour le monde.
(Editeur)
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