Longtemps considéré comme un nihilisme et accusé de pratiquer un « culte du néant » par les penseurs européens du XIX° siècle, le bouddhisme aujourd’hui mieux connu ne cesse pour autant d’être déconsidéré par les monothéismes, portés à voir dans l’a-théisme bouddhique une forme pernicieuse d’athéisme et refusant d’accorder crédit à une « religion » sans Dieu créateur. Nietzsche fut par ailleurs le premier philosophe occidental à s’inquiéter d’une possible collusion entre « l’asthénie de la volonté » que le bouddhisme était supposé préconiser, et le nihilisme dont l’ombre délétère commençait à s’étendre sur l’Europe. Le propos de ce livre est de retourner la position nietzschéenne à la faveur des acquis contemporains relatifs à la philosophie bouddhique, et de montrer que l’autodépassement du nihilisme envisagé par Nietzsche, puis par Heidegger et Jünger, suppose un « surmontement » (Überwindung) paradoxal du nihilisme auquel la vision bouddhique de la vacuité (sk. sūnyatā) pourrait apporter un éclairage inédit, comme l’a envisagé le philosophe japonais Nishitani Keiji dans son ouvrage majeur Qu’est-ce que la religion ? Au lieu d’être un obstacle en raison du nihilisme qu’on lui prête, l’enseignement du Bouddha pourrait de surcroît contribuer à ce que ce nouveau combat de Géants dont dépend l’avenir du monde occidentalisé prenne une tournure pacifique.
Professeur à l'Université Paris-1 Panthéon-Sorbonne, Françoise Bonardel enseigne la philosophie des religions de 1990 à 2010. Elle est également administratrice de l'Institut d'études bouddhiques. Elle a publié de nombreux ouvrages dont L'Irrationnel, PUF, coll. « Que sais-je ? », Philosopher par le feu. Anthologie de textes alchimiques, Seuil, Des héritiers sans passé. Essai sur la crise de l'identité culturelle européenne, Chatou, La Transparence.
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