mardi 29 mars 2016

Baptiste Morizot : Les Diplomates. Cohabiter avec les loups sur une nouvelle carte du vivant

Wildproject Editions - Mars 2016 - Domaine sauvage


Il s agit avant tout d'un problème géopolitique : réagir au retour spontané du loup en France, et à sa dispersion dans une campagne que la déprise rurale rend presque à son passé de « Gaule chevelue ». Le retour du loup interroge notre capacité à coexister avec la biodiversité qui nous fonde à inventer de nouvelles formes de diplomatie. Notre sens de la propriété et des frontières relève d'un « sens du territoire » que nous avons en commun avec d'autres animaux. Et notre savoir-faire diplomatique s'enracine dans une compétence animale inscrite au plus profond de notre histoire évolutive. Guidé par Charles Darwin, Konrad Lorenz, Aldo Leopold... et de nombreux autres « diplomates », Morizot propose ici un essai de philosophie animale. Comme un incendie de prairie, ce livre traverse et féconde les grands sujets de la philosophie de l'écologie, de l'éthologie, jusqu'à l éthique. Il esquisse un monde où nous vivrons « en bonne intelligence avec ce qui, en nous et hors de nous, ne veut pas être domestiqué ». 

Baptiste Morizot mène un travail singulier en philosophie du vivant, nourri des sciences et de sa pratique du pistage de loups. Agrégé et docteur en philosophie, il est maître de conférences à Aix-Marseille Université.

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samedi 26 mars 2016

Sam Azulys : Philosopher avec Game of Thrones

Ellipses Marketing - Mars 2016


Game of Thrones est un théâtre d'ombres shakespearien, un monde en guerre perpétuelle où le prix de l'honneur et de la vertu est exorbitant. Chacun attend son tour avant d'avancer ses pions sur le grand échiquier du destin. Chacun est confronté à des dilemmes insolubles et doit cheminer dans un labyrinthe d'intérêts contradictoires où la mort l'attend au tournant. Sans omettre d'éclairer ces enjeux politiques au coeur de l'univers du Trône de fer, l'originalité de l'ouvrage est d'explorer, à travers les personnages phares de la série, de Arya à Jon Snow, des thématiques philosophiques aussi variées que la violence, les passions, le pouvoir, l'identité, la liberté, la folie... Sam Azulys s'attache à montrer, au travers de ce dialogue inédit et rythmé entre philosophie et fiction, combien Game of Thrones fait écho aux mutations les plus actuelles : frontières infranchissables, émigrés clandestins, fanatiques, exécutions sommaires, crise financière, monde multipolaire agité de soubresauts incontrôlables où l'argent, le sexe et la manipulation de l'information par les médias sont rois, récit d'un empire fragilisé cherchant à éviter l'éclatement pendant que les barbares se massent à ses portes. Personne ne peut échapper à l'univers de Martin qui nous renvoie directement aux temps présents et à l'imaginaire apocalyptique qui les hante…

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Maël Renouard : Fragments d'une mémoire infinie

Grasset - Mars 2016 - Figures


Internet a changé notre monde, mais on ne sait pas encore combien il a changé l’existence humaine. Loin de la naïveté des passionnés de la technologie comme du «c’est toujours pareil» des blasés, Maël Renouard fait de lui-même le sujet littéraire et philosophique de l’expérience d’une vie avec Internet. Il en extrait des fragments, des pensées, des maximes ; il en fait une matrice à récits, et le soubassement d’une élaboration à nouveaux frais de la philosophie. Ce qui en résulte est un livre classique d’un genre nouveau, pour un monde nouveau, chargé d’histoire et de culture : à la fois essai à la Valéry, recueil à la Pascal, considérations sur le contemporain à la Baudrillard, pastiches à la Proust, récit à la Conrad, étude à la Barthes et sensations saisies sur le vif, Notes sur l’Internet entraîne le lecteur de paragraphe en paragraphe, avec un effet permanent de surprise, de variation et d’intelligence. Pas une ligne ne ressemble à une autre, et pourtant on se trouve, dans ce livre, comme dans une chambre où les échos reviennent de toute part. Chacun peut se découvrir soi-même en suivant le cheminement d’un esprit qui s’ouvre à nous. Des morceaux d’épopée issus du monde numérique y rejoignent le tombeau des expériences quotidiennes vécues par un auteur dont la vie se divise en deux - avant et après l’Internet. Parlant des générations futures, Maël Renouard prédit : «C’est dans l’infini qu’ils enfouiront leurs secrets». Notre existence, toujours plus exposée, semble nous distraire parfois des enjeux d’une vie esthétique et philosophique. Cet ouvrage nous reconduit dans notre vie intérieure, en usant de ce qui lui semble le plus contraire : l’association permanente à une mémoire extérieure, infinie.

Maël Renouard est écrivain, philosophe, traducteur. Il a reçu le prix Décembre en 2013 pour La Réforme de l’opéra de Pékin.

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jeudi 24 mars 2016

Pierre Legendre : L'animal humain et les suites de sa blessure. Conférence à Montpellier

Fayard - Mars 2016


"Qu'est-ce qui fait l'humanité de l'homme, qui le détache de l'animalité, du tout biologique ? A la question anthropologique fondamentale, cette conférence répond en associant l'animal humain et la blessure une blessure première, primitive : le phénomène de la parole. La parole sépare l'homme des autres espèces et de sa propre opacité animale, elle introduit en lui la conscience réflexive qui implique de se savoir mortel et fait surgir la question existentielle de l'identité/altérité. Radicalement soustrait à la relation directe avec le monde, l'individu est arrimé à l'ordre langagier et enchaîne le monde au langage. Dès lors s'instaure l'interlocution de l'homme avec lui-même et avec le monde, devenu figure de l'altérité. Ainsi compris, ce fait structural détermine la condition humaine. Il éclaire la fragilité des civilisations, la délicate construction de l'homme et de la société, le lien entre le principe de raison et l'institutionnalité, mais aussi cet enjeu que l'Occident appelle la religion. La conférence de Montpellier fait suite à la série de mes Leçons, à laquelle s'ajoutent des livres synthétiques, comme De la Société comme Texte ou Sur la question dogmatique en Occident, tous parus aux éditions Fayard." PL

Né en 1930, Pierre Legendre est juriste et psychanalyste. Agrégé de droit romain et expert auprès d'institutions internationales (UNESCO), il a soutenu, en 1963, une thèse en histoire du Droit. Poursuivant parallèlement des études de psychanalyse, disciple de Jacques Lacan, il s'intéresse au langage dans les sociétés humaines. Il fonde les bases d'une nouvelle discipline, l'anthropologie dogmatique. Spécialiste en théorie psychanalytique, il est professeur émérite à Paris-I et directeur d’études honoraire à l’École pratique des hautes études (section des sciences religieuses). Il a fondé et dirige le Laboratoire européen pour l'étude de la filiation. L’originalité de sa réflexion et l’ampleur de son oeuvre l'ont imposé comme l'un des plus grands penseurs de notre époque. Il a réalisé trois films remarqués à partir de plusieurs de ses ouvrages. Il est notamment l'auteur des Leçons (I à VIII), toutes éditées et rééditées aux éditions Fayard, de Miroir d'une nation : L'École nationale d'administration (Mille et une nuit, 1999), Ce que l'Occident ne voit pas de l'Occident (Mille et une nuits, 2004), La Balafre : À la jeunesse désireuse... Discours à de jeunes étudiants sur la science et l'ignorance (Mille et une nuits, 2007) et Dominium mundi : L'empire du management (Mille et une nuits, 2007).

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Dominique Reynaud : Qu'est-ce que la technologie ? Suivi de Post-scriptum sur la technoscience

Matériologiques - Février 2016 - Collection : Sciences & philosophie


Est-il vrai que la science et la technologie forment un tout ? Qu’elles sont unies par des liens constants et nécessaires ? Est-il vrai que le raisonnement technologique prend toujours place dans un contexte industriel ? Que les bio- et nanotechnologies forment la part essentielle des technologies contemporaines ? Que l’application définit adéquatement la relation entre la science et la technologie ? Dans ce livre, Dominique Raynaud examine les limites de chacune de ces idées. Il dresse un panorama complet des problèmes que pose la technologie au moyen d’une étude détaillée des aspects cognitifs, ergologiques, professionnels et juridiques de la relation entre la science et la technologie et met à nu la fiction utilitariste de la prétendue « technoscience ». Tout aussi éloigné de l’apologie que de la critique radicale, ce livre défend une perspective empirique et analytique dans l’étude de la technologie.
« Le livre que vous avez dans les mains est la première étude de toutes les facettes de la technologie, depuis la conception des artefacts technologiques jusqu’aux problèmes philosophiques et juridiques que soulèvent le savoir et le savoir-faire technologiques. […] Cependant, Raynaud n’hésite pas à qualifier de toxique pour la technologie elle-même la politique des utilitaristes qui font primer le “développement” sur la recherche fondamentale, car toutes les innovations technologiques sont issues de connaissances fondamentales. […] Comme le disait Guido Beck, mon professeur de physique, ils n’ont pas compris qu’il ne peut pas y avoir de lait de vache sans vache », Mario Bunge (extrait de la préface).

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Joëlle Zask : La démocratie aux champs. Du jardin d'Eden aux jardins partagés, comment l'agriculture cultive les valeurs démocratiques

La Découverte - Mars 2016 - Les empêcheurs de penser en rond


On a l'habitude de penser que la démocratie moderne vient des Lumières, de l'usine, du commerce, de la ville. Opposé au citadin et même au citoyen, le paysan serait au mieux primitif et proche de la nature, au pire arriéré et réactionnaire. 
À l'opposé de cette vision, ce livre examine ce qui, dans les relations entre les cultivateurs et la terre cultivée, favorise l'essor des valeurs démocratiques et la formation de la citoyenneté. Défile alors sous nos yeux un cortège étonnant d'expériences agricoles, les unes antiques, les autres actuelles ; du jardin d'Éden qu'Adam doit " cultiver " et aussi " garder " à la " petite république " que fut la ferme pour Jefferson ; des chambrées et foyers médiévaux au lopin de terre russe ; du jardin ouvrier au jardin thérapeutique ; des " guérillas vertes " aux jardins partagés australiens. 
Cultiver la terre n'est pas un travail comme un autre. Ce n'est pas suer, souffrir ni arracher, arraisonner. C'est dialoguer, être attentif, prendre une initiative et écouter la réponse, anticiper, sachant qu'on ne peut calculer à coup sûr, et aussi participer, apprendre des autres, coopérer, partager. L'agriculture peut donc, sous certaines conditions, représenter une puissance de changement considérable et un véritable espoir pour l'écologie démocratique.

Joëlle Zask enseigne au département de philosophie de l'université Aix-Marseille. Elle vient de publier une Introduction à John Dewey (La Découverte, 2015).

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mercredi 23 mars 2016

Magali Roques : L'essentialisme de Guillaume d'Ockham

Vrin - Mars 2016 - Etudes de philosophie médiévale


Guillaume d’Ockham (1285-1347), défenseur bien connu du nominalisme, a manifesté un intérêt soutenu pour les définitions réelles. Cet ouvrage s’efforce de reconstruire sa position sur la nature et la fonction des définitions réelles. Un examen de ce qu’est une définition réelle appelle une étude de ce qu’est une essence et de la nature du lien à poser entre l’essentiel et le nécessaire. Cet ouvrage a pour objectif de montrer que le nominalisme ne contraint pas à une position déterminée sur les essences.
Saul Kripke nous dit que l’essentiel se réduit au nécessaire. Kit Fine, par contre, affirme qu’il faut revenir à Aristote et soutenir que l’essentiel est irréductible au nécessaire. Notre examen atteste qu’une étude en histoire de la philosophie a toute sa place dans les débats contemporains. L’essentialisme de Guillaume d’Ockham incite à rendre à Aristote ce qui lui revient et à faire preuve de circonspection. En définitive, les deux positions en présence ne sont peut-être pas incompatibles.

Magali Roques est post-doctorante à la Freie Universität Berlin (Topoi) et membre associée au Centre d’Études Supérieures de la Renaissance.

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Paul Clavier : Anathèmes, blasphèmes & Cie - Au-delà des caricatures

Le Passeur - Mars 2016


Depuis la fatwa à l'encontre de Salman Rushdie, l'exécution des caricaturistes de Charlie Hebdo ou les tragiques attentats parisiens du 13 novembre 2015, la religion fait un retour violent dans l'espace public. D'aucuns font alors l'" éloge du blasphème " et revendiquent un droit absolu d'expression. Chacun bannit son contradicteur à coup d'anathèmes. Tout religieux serait un fanatique en puissance, tout athée un ennemi acharné de la liberté religieuse. Dès lors, comment continuer à envisager de vivre ensemble ? Quelle est la portée de l'outrage envers Dieu ou une communauté religieuse ? Qu'est-ce qu'une liberté d'expression sans bornes ? 
Paul Clavier redistribue les cartes et offre ainsi des outils affutés par notre tradition pour comprendre le monde dans lequel nous vivons. Il montre, en philosophe, comment l'obéissance aveugle ne rend pas justice au respect inconditionnel dont l'homme entend témoigner par son engagement religieux. Il démonte l'apparente cohérence d'un commandement de tuer l'impie. Parallèlement, il souligne que quiconque admet qu'il y a des droits et des obligations imprescriptibles, reconnaît implicitement l'existence d'une source absolue d'obligation. Qu'on la nomme Dieu ou d'un autre nom, l'essentiel reste de ne pas l'invoquer en vain. Athées et croyants, également concernés, sont peut-être plus proches qu'ils ne veulent bien l'avouer.

Paul Clavier est agrégé de philosophie et enseigne à l'École Normale supérieure (Ulm) ainsi qu'à Sciences Po. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages, parmi lesquels Dieu sans barbe (2002), La Cote argus des valeurs morales (2007), L'Énigme du mal (2011), Qu'est-ce que le créationnisme ? (2012), La fourmi n'est pas prêteuse (2014).

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Richard de Mediavilla : Deuxième Quodlibet

Les Belles Lettres - Mars 2016 - Bibliothèque scolastique


Traduit par Alain Boureau

Le deuxième Quodlibet de Richard de Mediavilla, le plus long des trois recueils du franciscain, composé de trente et une questions, est d'une richesse et d'une variété certaines. La date de 1295 ou 1296 y est confirmée par le contexte de la question 30. Cette très longue question discute en détail l'imposition fiscale des clercs, juste avant la décrétale Clericis laicos de Boniface VIII (février-avril 1296).
En dehors de cette question, trois thèmes semblent dominer: la catégorie de quantité, en liaison avec la question eucharistique (question 3, 14 et 15), la gradation des formes (questions 3 et 4) avec un approfondissement du Principe Pur Possible et la liberté christique (questions 7, 8, 10 et 21). Les questions naturelles, notamment sur la consommation des aliments et sur l'influence de la taille sur l'intellect, offrent des perspectives assez inattendues. Les questions "morales" occupent le dernier tiers du recueil. S'en détachent deux questions sociales sur les rentes et l'impôt (23 et 30) qui sont très longuement développées. On y trouvera en outre des réflexions aiguës sur le droit. En un mot, ce deuxième Quodlibet semble plus encyclopédique. Enfin, l'aspect "testamentaire" de l'œuvre se manifeste par le retour sur certains points de doctrine disputés avec Pierre de Jean Olivi, tantôt pour maintenir des positions, tantôt pour nuancer des critiques. À ce titre, ce recueil présente un intérêt exceptionnel.

Le moine franciscain Richard de Mediavilla (c.1243-1308) est un penseur scolastique profondément original et de première importance, pionnier du grand tournant de la pensée qui apparaît chez Duns Scot et chez Ockham. Son œuvre philosophique et théologique a été influente jusqu'au XVIIe siècle.

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mardi 22 mars 2016

Philippe Corcuff : Pour une spiritualité sans dieux

Textuel - Mars 2016


La quête d'un sens à la vie n'a pas disparu de notre monde dominé par l'argent. Au contraire s'affirme une attente de sagesse face au dessèchement mercantile des aspirations humaines. Philippe Corcuff explore ici un sentier agnostique original, ni religieux, ni antireligieux : celui d'une éthique de la fragilité. Il s'appuie pour cela sur la pensée des philosophes, de Wittgenstein à Foucault, ou sur les paroles de chansons, de Barbara à Louane. Face au brouillard spirituel de notre temps confus et sanglant, l'ouvrage propose à chacun de produire ses propres réponses à partir des vulnérabilités de son existence.

Philippe Corcuff est maître de conférences de science politique à l'IEP de Lyon. Ancien chroniqueur de Charlie Hebdo, co-fondateur de l'Université Populaire de Lyon et de l'Université Critique et Citoyenne de Nîmes, il a notamment publié aux éditions Textuel : Mes années Charlie et après ? (2015), Les années 30 reviennent et la gauche est dans le brouillard (2014), Polars, philosophie et critique sociale (2013) et La gauche est-elle en état de mort cérébrale? (2012).

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Jean-Michel Le Lannou : La puissance d'être

Editions Hermann - Mars 2016


En nous, une puissance d'excès proteste contre toutes les modalités d'appropriation, de servitude donc. Que révèle-t-elle ? L'antécédence du " libre ". Dans une radicale distinction à l'égard du libre arbitre, qu'il soit " néant " ou " possibilité pure ", nous désignons le " libre " comme principe de l'être. De son antécédence nous pouvons penser l'advenue de toute réalité. Nous-mêmes, comme particulier, pouvons enfin nous comprendre comme effet d'un processus : la " finitisation ". Qu'est-elle si ce n'est le terme de l'exercice du penser qui s'abandonne ? Que sommes-nous d'autre que l'effet du désir d'impuissance, le paradoxal effet du penser qui en nous se veut et fait fini ? La philosophie pourra dorénavant comprendre son aspiration à l'immensité comme la tâche radicale qui doit défaire ce processus, et ainsi nous libérer du fini.

Jean Michel Le Lannou, agrégé de philosophie, est professeur en première supérieure. Il dirige la collection "Arts et Philosophie" aux éditions Hermann.

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Ramona Fotiade (dir.) : Léon Chestov (1866-1938). La pensée du dehors

Le Bruit du temps - Mars 2016


Ce catalogue, préfacé et rédigé par Ramona Fotiade, rend compte de la première exposition jamais consacrée à la vie et à l’œuvre de Léon Chestov, ce « penseur du dehors », qui vécut à Paris de 1922 à sa mort en 1938. Il retrace en quatre chapitres chronologiques richement illustrés la vie et l’œuvre du penseur russe, de sa naissance à Kiev dans une Russie en proie au bouillonnement intellectuel qui précéda les événements de 1917 jusqu’aux fécondes années de son exil parisien, durant lesquelles, malgré les difficultés matérielles, il approfondit et enrichit son œuvre dans un isolement relatif. L’album montre en effet, notamment en reproduisant des correspondances, les relations que Chestov entretient avec des proches, son traducteur Boris de Schloezer, mais aussi avec certains de ses pairs, Edmund Husserl, Martin Heidegger, Martin Buber, ou avec ceux qui, à Paris, marquèrent de l’intérêt pour son œuvre, d’André Gide à Benjamin Fondane, en passant par Henri Bergson et Lucien Lévy-Bruhl. Un cinquième chapitre est consacré à la réception posthume de l’œuvre, d’Albert Camus à Maurice Blanchot, de Gilles Deleuze à Yves Bonnefoy.

Les documents (photographies, manuscrits, lettres, éditions originales), dont beaucoup n’avaient jamais été publiés, proviennent essentiellement des archives de la famille Chestov, de la bibliothèque de la Sorbonne à laquelle la bibliothèque et les papiers de Chestov ont été légués après sa mort, de la médiathèque de Monaco où est conservé le fonds Boris de Schloezer et des archives Martin Buber à Jérusalem.

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Aline Wiame : Scènes de la défiguration – Quatre propositions entre théâtre et philosophie

Les presses du réel – Mars 2016 – Collection Nouvelles scènes


Entre théâtre et philosophie, une exploration des captures qui s'opèrent entre les écritures scéniques de la « défiguration » post-anthropocentrique et la réinvention des moyens expressifs de la philosophie contemporaine.
Le XXe siècle a vu s'affirmer une mise en crise profonde des figures de l'humain, menant à un paradigme post-anthropocentrique dont nous sommes aujourd'hui les héritiers. Les écritures théâtrales de Müller, Pasolini, Genet ou Beckett fourmillent de mouvements de défiguration qui dynamisent les formes figées de l'identité normative et qui explorent les zones troubles de l'humain et du non-humain. Mais la défiguration, au théâtre, n'est pas seulement une question thématique : elle affecte également les pratiques de représentation et de production de savoirs. 
Se situant résolument entre théâtre et philosophie, cet ouvrage se propose d'explorer les captures qui s'opèrent entre les écritures scéniques de la défiguration et la réinvention des moyens expressifs de la philosophie contemporaine. Avec des alliés tels que Deleuze, Souriau, Foucault ou Lacoue-Labarthe, il explore la déposition de la raison dramatique, la scène conçue comme territoire philosophique, la fabrique scénique de la subjectivité ou encore l'invention conceptuelle de drames post-anthropocentriques.

Aline Wiame est docteur en philosophie et chargée de recherche du FNRS à l'Université Libre de Bruxelles. Elle a été Visiting Scholar au département de philosophie de la Penn State University. Ses recherches concernent la construction de savoirs entre philosophie et arts de la scène, la raison cartographique et l'esthétique de l'Anthropocène.

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lundi 21 mars 2016

Claudine Tiercelin : Le doute en question

Editions de l'éclat - Mars 2016 - Tiré à part


Le doute prend aujourd hui des formes multiples et menace des domaines aussi variés que l éthique, la science ou la métaphysique, jusqu à la moindre de nos certitudes quotidiennes. Aux formes contemporaines du traditionnel défi sceptique correspondent pourtant ­différentes réponses philosophiques. Les pragmatistes, par exemple, au premier rang desquels Charles S. Peirce, William James ou plus récemment Hilary Putnam, ont pris toute la mesure de ce défi et proposent des parades originales. À quelles conditions pouvons-nous douter ? Peut-on décider de croire ? Qu en est-il du vrai ? Percevons-nous le monde extérieur ? Ne vaudrait-il pas mieux douter du doute ? L objet de ce livre est d analyser ces questions, d en évaluer la portée, et de fournir des armes contre les assauts toujours renouvelés du scepticisme, du domaine de la connaissance à celui de la vie éthique et sociale.

Claudine Tiercelin est professeur au Collège de France, titulaire de la chaire de Métaphysique et philosophie de la connaissance. Elle est l auteur de nombreux articles et ouvrages, parmi lesquels, La Pensée-signe, Éditions Jacqueline Chambon, 1993; Peirce et le pragmatisme, PUF, 1993; Putnam, l héritage pragmatiste, PUF, 2002, Le Ciment des choses, Ithaque, 2011 ou La connaissance métaphysique, Fayard, 2011. Le Doute en question, publié pour la première fois en 2005, reparaît aujourd hui augmenté d une postface.

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Sophie Lacroix : L'humanité des larmes

Manucius - Mars 2016 - Le philosophe


Les larmes, manifestations physiques, renvoient pourtant le plus souvent à une douleur psychologique ; elles engagent donc la totalité de la personne et s'affirment comme phénomène et signe exemplaires pour interroger l'incarnation humaine.
Quel est précisément le corps qui vit au présent un excès d'affects tel, qu'il ne peut que « s'abandonner » mystérieusement aux larmes ? Ne renverrait-il pas à un secret d'origine qui mettrait en scène la mémoire d'un corps absent, gardien de la vérité la plus intime de chacun ?
En deçà de l'exigence de transparence qu'elles subvertissent, les larmes ne sont-elles pas fondatrices d'un lien social dès lors qu'elles invitent à s'émouvoir de la fragilité de l'homme ?

Sophie Lacroix, agrégée de philosophie, est l'auteur d'une thèse de doctorat publiée en 2007 sous le titre Ce que nous disent les ruines et de deux essais, Ruine (éditions de la Villette, 2008) et Tombeaux (Manucius, 2013). Elle poursuit dans ce présent ouvrage sa réflexion sur la mémoire.

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Académie Catholique de France : Maurice Blondel et la métaphysique

Parole et Silence Editions - Mars 2016


A l'heure où les conséquences amères des idéologies sanglantes du siècle dernier font encore sentir leur poids, à l'heure où les capacités techniques de l'homme semblent lui promettre une manipulation à l'infini de son être et des êtres, à l'heure où nous prenons conscience des nécessités d'une écologie intégrale (pape Francois), le besoin se fait sentir d'une nouvelle interrogation métaphysique. Les dangers que courent l'homme et le monde ne peuvent se conjurer par les seules bonnes intentions déclarées. Les enjeux actuels exigent une méditation puissante et de susciter une double question : l'être est-il digne d'amour et l'amour est-il digne de l'être ? A Marseille et à Aix, sous les auspices de l'Académie catholique de France, de l'Association des Amis de Maurice Blondel, de l'Institut catholique de la Méditerranée et avec le soutien de l'Association des Sociétés de Philosophie de Langue francaise (ASPLF), le colloque Blondel et la métaphysique, a rassemblé, les 4 et 5 juin 2015, un certain nombre de spécialistes en vue de s'interroger sur l'actualité de la métaphysique et le sens d'une métaphysique de la charité comme la souhaitait tant Blondel. Jean-Luc Marion, de l'Académie francaise, a bien voulu, dans une postface incisive, nous engager à ne pas conclure !

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François Jullien : Vivre en existant. Une nouvelle Éthique

Gallimard - Mars 2016 - Bibliothèque des idées


Entre ces deux grands termes rivaux, l'être et le vivre, exister est le verbe moderne qui fait lever un nouveau possible. Mais comment décrire l'existence sans plus construire - comme la philosophie l'a fait de l'Etre - en s'en tenant au ras du vécu ? Je cherche ici des concepts qui décolleraient le moins de l'expérience : on reste dans l'adhérence au vital ou on en désadhère. Car exister, c'est d'abord résister. Sinon ma vie s'enlise ; ou bien elle peut basculer. Elle s'amorce et se résorbe. Elle reste prise dans le " dur désir de durer " ou bien je peux en émerger. Car si vivre, c'est déjà dé-coïncider d'avec soi (sinon c'est la mort), exister est ce verbe nouveau qui, détaché de l'Etre, se promeut en ressource. " Ex-ister ", c'est en effet, littéralement, " se tenir hors " - il faudra dire de quoi. Ou comment émerger du monde, mais dans le monde, sans verser dans l'au-delà de la métaphysique ? De là se dégage une nouvelle éthique qui ne prêche pas : vivre en existant. F. J.

Philosophe et sinologue, François Jullien est né en 1951. Il est titulaire de la Chaire sur l'altérité au Collège d'études mondiales de la Fondation de la Maison des Sciences de l'Homme. Son travail est traduit dans quelque vingt-cinq pays. Il a déjà publié aux Editions Gallimard Philosophie du vivre (Bibliothèque des Idées, 2011), Entrer dans une pensée ou Des possibles de l'esprit (Bibliothèque des Idées, 2012), Vivre de paysage ou l'impensé de la Raison (Bibliothèque des Idées, 2014), De l'Etre au vivre. Lexique euro-chinois de la pensée (Bibliothèque des Idées, 2015).

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vendredi 18 mars 2016

Marc Richir : Propositions buissonnières

Jérôme Millon - Mars 2016 - Krisis



En posant la question du sublime et du soi, Marc Richir retrouve certaines questions fondamentales de Hegel, de Schelling et de Fichte, qui le poussent vers ce qui lui paraît comme l'ultime, au-delà duquel il est impossible d'aller sans dogmatisme : l'écart différentiel et la vibration instantanée. Expressions hautement paradoxales, qui amènent à une réévaluation de la phénoménologie husserlienne jusqu'à une relecture nouvelle de la philosophie classique, en passant par une épochè hyperbolique de la pensée heideggerienne - la mise hors circuit de toute «légende» ontologique ou «méta-ontologique». Tout cela, qui ne pouvait faire l'objet d'un ouvrage systématique, ne pouvait s'énoncer, à ses risques et périls, que sous la forme de «propositions» de dimension variable, vagabondant dans une problématique passablement complexe, au fil de son inspiration, allant pour ainsi dire de buisson en buisson.

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Hélène Malard et Marie Mignot : Pic de la Mirandole et l'ange jaloux

Les Petits Platons - Mars 2016


Dans une Italie à feu et à sang, Pic de La Mirandole veut établir la paix entre les savants. Kéroub, un ange très futé, l'observe en cachette. Pourquoi Dieu a-t-il confié ce grand projet de concorde à un simple mortel ? La nature humaine serait-elle plus digne que les esprits célestes ?

Hélène Malard traduit et commente Pic de La Mirandole pour sa thèse de philosophie. Férue de contes et d'opéra, elle vit une fabuleuse aventure en étudiant les manuscrits cryptés de l'humaniste italien.

Marie Mignot est diplômée des Arts Décoratifs de Strasbourg, travaille régulièrement pour la presse, et publie ici son premier livre. Parallèlement, elle développe des projets personnels allant de la bande dessinée historique à l'album jeunesse loufoque, en passant par des images gravées.

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Henri Meschonnic : Le sacré, le divin, le religieux. Suivi d'un entretien avec Anne Mounic

Arfuyen - Mars 2016 - La faute à Voltaire


Comprendre la place du religieux dans la cité suppose de savoir distinguer le sacré, le divin et le religieux : « Le religieux, écrit Meschonnic, n’est pas le divin. Le religieux – ou la religion – est la socialisation, l’institutionnalisation, l’appropriation, la captation, la gestion du divin. Le gestionnaire du divin. Le culte. Le cultuel et le culturel du divin. Mais le gestionnaire du divin s’identifie au divin, à force de se l’approprier, et de le gérer. Et comme sa gestion est sociale, elle est politique. Le religieux est le théologico-politique. »
Si le but de la présente collection, « La faute à Voltaire », c’est de faire entendre à nouveau une parole libre et forte qui puisse nourrir la réflexion du citoyen sur les grands problèmes actuels de la cité, ce premier livre de la collection, Le sacré, le divin, le religieux, d’Henri Meschonnic, en offre un bon exemple. En un texte et un entretien brillants et allègres, Henri Meschonnic rend simples et limpides des distinctions que l’humanité d’aujourd’hui ne sait malheureusement plus faire.
« L’humanité, écrit Meschonnic, est malade du théologico-politique. Elle est malade de confondre le sacré, ce temps du conte, du temps que les bêtes parlaient, avec le divin, qui est la création de la vie, la sainteté étant ce qui touche au divin. Elle est encore plus malade de confondre le divin avec le religieux, qui n’est que la confiscation du divin par ceux qui s’en proclament les porte-parole et les propriétaires. Et c’est le religieux qui est le théologico-politique. »
Le malheur des temps s’alimente toujours de confusions et de contresens. L’honneur de Voltaire, de Spinoza, et de leurs successeurs peut et doit être de les dissiper par la rigueur et la clarté d’une pensée ouverte à tous.

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Jean-Pierre Dupuy : La jalousie. Une géometrie du désir

Ed. du Seuil - Mars 2016


Trop souvent, on traite la jalousie et l'envie comme si elles étaient interchangeables. Rien n'est plus faux. Ce livre part de la théorie du désir mimétique de René Girard : le sujet envie le modèle qui a éveillé en lui le désir pour un objet que pourtant ce modèle se réserve. Il n'y a pas de désir sans rivalité ni de rivalité sans désir. Or cette théorie échoue à rendre compte de la jalousie. Elucider cet obstacle conduit à mettre en question le caractère universel du désir mimétique. Celui-ci prend au départ la forme d'un triangle : le sujet, le modèle et l'objet. La jalousie relève d'une tout autre géométrie : le sujet souffre d'être exclu d'un monde qu'il voit se clore sur lui-même. Dans la jalousie amoureuse, ce monde est formé par l'étreinte des deux amants. Don Giovanni n'imite ni n'envie le paysan Masetto, qu'il méprise. Mais il ne peut supporter le cercle amoureux qu'il forme avec Zerlina. Son désir commence par la jalousie. Celle-ci est, comme chez Proust, antérieure au désir. Nourri de littérature, de philosophie et d'expériences personnelles, ce livre débouche sur une théorie générale de la jalousie, cette souffrance tenue pour élément indépassable de la condition humaine. Une postface d'Olivier Rey met cette théorie à l'épreuve de la psychanalyse.

Philosophe, Jean-Pierre Dupuy est professeur émérite à l'Ecole Polytechnique et professeur titulaire à l'université Stanford (Californie). Il est l'auteur d'une quarantaine d'ouvrages dont Petite Métaphysique des tsunamis (Seuil, 2005, Points, 2014) et L'Avenir de l'économie. Sortir de l'économystification (Flammarion, 2012).

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Maurice Clavelin : Galilée, cosmologie et science du mouvement suivi de Regards sur l'empirisme au XXe siècle

CNRS Editions - Mars 2016


Ces deux essais tournent autour des deux thèmes de prédilection de Maurice Clavelin. Le premier, Galilée ou la naissance de la science moderne, interroge l'un des tournants les plus importants de l'histoire des sciences : le " moment Galilée ". L'auteur montre que ce n'est pas une simple critique des idées traditionnelles ou une meilleure attention portée aux données de l'observation qui caractérise la science de ce génie. Rallié aux théories de Copernic, Galilée crée une vraie science mathématisée du mouvement, véritable révolution conceptuelle qui ouvre une ère nouvelle à la spéculation sur la Nature, et signe ainsi l'acte de naissance de la science moderne. Le second aborde sous un angle inédit le rapport entre science et philosophie. Il montre qu'au début du XXe siècle, et après une longue stagnation, la théorie empiriste de la connaissance reprend forme et rigueur sous l'influence combinée de la logique symbolique et de l'interprétation logiciste des mathématiques. Le rôle de Russell est ici décisif, comme ses réinterprétations par Wittgenstein, Quine, et le cercle de Vienne. Un livre qui clôt l'oeuvre d'un grand philosophe des sciences.

Né en 1927, agrégé de philosophie, spécialiste de Galilée comme de l'influence de la logique sur la philosophie au XXe siècle, Maurice Clavelin est l'une des figures fondamentales de la philosophie des sciences en France.

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Pierre Vesperini : Droiture et mélancolie. Sur les écrits de Marc-Aurèle

Editions Verdier - Mars 2016 - Philosophie


Marc-Aurèle est aujourd'hui considéré comme un philosophe stoïcien à part entière, au même titre que Sénèque ou Epictète. Pierre Vesperini remet ici en cause cette "opinion commune" à partir d'un nouvel examen des écrits de l'auteur, notamment de passages souvent ignorés, croisés avec toutes les autres sources, exceptionnellement nombreuses, dont nous disposons à son propos. Conformément à une pratique courante dans l'Antiquité, Marc-Aurèle utilise les "discours philosophiques" pour "rester droit", lorsque l'âme est ébranlée par les affects produits par le monde extérieur ou par le déséquilibre des humeurs, notamment de l'humeur mélancolique. Par ailleurs, l'auteur montre combien l'éthique ancienne est éloignée des conceptions de Pierre Hadot et de Michel Foucault. Le "soi" visé par les pratiques éthiques n'est pas un "soi" intérieur, mais un "soi" tout extérieur, entièrement soucieux du regard des autres, et de donner la plus belle image possible. La "droiture" ne consiste pas en l'adoption d'un "mode de vie" spécifique, mais au contraire en l'adoption d'un mode de vie le plus conforme possible aux attentes sociales, en fonction du statut de chacun. Enfin, l'éthique philosophique n'est jamais coupée du religieux, dans la mesure où "bien vivre", c'est "vivre avec les dieux".

Pierre Vesperini est l'auteur de La philosophia et ses pratiques d'Ennius à Cicéron (Ecole française de Rome, 2012) et de plusieurs articles d'anthropologie historique de la philosophie antique.

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Michel Juffé : Sigmund Freud - Benedictus de Spinoza: Correspondance 1676-1938

  • Gallimard - Mars 2016 - Connaissance de l'inconscient


Voici une correspondance peu banale. Début 1670, à trente-huit ans, Spinoza (exclu de sa communauté depuis qu'il a vingt-trois ans) publie, anonymement, son Traité des autorités théologiques et politiques. Ce livre est iconoclaste. Il montre que la Bible est de source humaine, que les miracles sont des manières de parler, que les prophètes sont plus doués de convictions et d'imagination que de raison ; que Moïse lui-même n'est pas l'auteur de la Torah et que, si Dieu lui parle " face à face ", c'est une figure de style, car Dieu n'est pas une personne qui pourrait s'adresser à une autre personne. Tout porte à croire que Freud ne connaissait guère Spinoza. Il en parle très rarement. Lorsqu'on lui demande, en 1932, de contribuer à un ouvrage pour le tricentenaire de la naissance de Spinoza, il décline l'invitation : il n'est pas qualifié. En 1934, Freud écrit ce qui deviendra L'Homme Moïse et la religion monothéiste, livre publié l'année de sa mort, en 1939. Il s'attaque aux fondements de la religion. Romain Rolland l'incite à lire, ce qu'il fait, le Traité des autorités théologiques et politiques. Pourtant, aucune allusion à Spinoza dans L'Homme Moïse, alors que tous deux partagent nombre d'idées essentielles et controversées. D'où l'idée de Michel Juffé d'écrire cette correspondance, de faire se parler et s'expliquer les deux grands hommes sur ce qui les sépare et les réunit. Au début de ces seize lettres, Freud a quatre-vingts ans et deux ans et demi à vivre et voit venir la tempête qui va s'abattre sur l'Europe. Le désir de savoir ce que Spinoza aurait pensé de son Moïse le décide à lui écrire, à deux-cent-soixante ans de distance. Spinoza est enchanté et lui répond. Lui, n'a plus qu'un an à vivre. Ils n'ont plus rien à perdre, plus rien à gagner, d'où leur très grande sincérité. Ils sont curieux jusqu'à la passion, et ils vont s'obliger réciproquement à être clairs et à aller plus loin. Chacun cherche à faire comprendre à l'autre de quoi il retourne et cela donne une lecture vivante, mouvementée, souvent drôle sans rien de complaisant, émouvante à la fin. Un glossaire des auteurs cités termine l'ouvrage.

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jeudi 17 mars 2016

Jean-Louis Poirier : Ne plus ultra. Dante et le dernier voyage d'Ulysse

Les Belles Lettres - Mars 2016 - Essais


Franchissant les Colonnes d'Hercule, Ulysse et ses compagnons s’aventurent vers l’inconnu, sur l’Océan, en quête de l’expérience inouïe du « monde sans habitants ». Leur navire emporté par un tourbillon, ils disparaissent corps et biens.
Prenant appui sur le récit de Dante, au Chant XXVI de L’Enfer, l’essai avance un questionnement dans plusieurs directions.
À côté d’une problématique de la mémoire et de la transmission, le destin d’Ulysse conduit à interroger l’entreprise même d’explorer le monde, avec les interdits qu’elle ne cesse à la fois de braver et de susciter, mobilisée de l’intérieur par des pulsions qui n’accèdent pas toujours à la lumière, mais aussi de l’extérieur par la présence insistante de recoins inaccessibles dans un monde de moins en moins hospitalier.
En retravaillant, avec Blumenberg, le thème de la non-fiabilité du monde, la voie est ouverte à un approfondissement qui dirige l’interrogation vers quelques métaphores décisives, en particulier celles qui relèvent de la navigation et du naufrage. En un champ à la fois métaphysique, historique et éthique, parfois théologique, on tente au fond de dégager les réquisits premiers de toute découverte du monde et d’esquisser ce qu’en termes phénoménologiques on pourrait appeler une archéologie de l’exploration du monde. Bref, on décrit la figure singulière, historique et concrète, que prend dans l’espace terrestre le partage du connu et de l’inconnu, ce partage même qui oppose le « monde habité » et le « monde sans habitants », et que déstabilise radicalement, au début des Temps modernes, l'irrésistible fièvre qu'a l'homme de connaître son monde.

Jean-Louis Poirier a enseigné plus de vingt ans en khâgne, au lycée Henri IV. Spécialiste de philosophie antique (il a collaboré à l'édition et à la traduction des Présocratiques et des Épicuriens pour la Bibliothèque de la Pléiade), il est auteur de divers articles et contributions en histoire de la philosophie et en sciences humaines. Fervent italophile, il a consacré un ouvrage à l’enseignement de la philosophie en Italie.

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mercredi 16 mars 2016

Jean-Clet Martin : Le siècle deleuzien

Kimé - Mars 2016 - Bifurcations


« Un jour peut-être, le siècle sera Deleuzien » affirmait Foucault dans une recension sur Deleuze. Notre étude s’attache à ce diagnostic quand la philosophie cherche à dire un siècle à travers ce qui lui échappe ou le déborde. Et cela a eu lieu pour « Le siècle de Descartes », « Le siècle des Lumières »… Une telle nomination se produit évidemment sur un autre théâtre que les événements politiques et désigne une actualité décalée. Ces noms séculaires pour marquer une figure du monde, actuels finalement par leur rupture, échappent à leur histoire comme des flèches jetées vers l’avenir. « Le siècle Deleuzien » se reconnaît d’abord aux enfants terribles de Deleuze, aux contemporains nombreux auxquels nous avons confronté ses thèses comme pour en dégager l’ombre : ombre projetée sur notre parcours ainsi que sur ceux de Derrida, de Badiou, de Jean-Luc Nancy…
« Multiplicités », « différences », « variétés », tels sont des noms pour une époque qui n’a plus rien de commun avec le « siècle de la Raison », lequel pensait toujours par unité et totalité. « Le siècle de Deleuze » n’est pas en effet celui de l’infini comme pour Descartes ou Pascal qui en avaient distingué les ordres. Au siècle de l’infinité, au siècle qui en domine les puissances, succède bel et bien celui du Chaos auquel cet essai se mesure en y cherchant un nouvel équilibre, des associations qui passent par des mondes pluriels.

Jean-Clet Martin, ancien Directeur de programme au Collège International de Philosophie, auteur de nombreux ouvrages sur Deleuze, Derrida, Foucault ainsi que sur le pluralisme qui caractérise notre temps. Crée chez Kimé la collection Bifurcations.

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