Une révolution est nécessaire dans les sciences du vivant. La génétique – fondamentalement déterministe –, ne tient pas la route face à la somme des données expérimentales démontrant que le hasard est omniprésent dans le vivant, y compris dans le fonctionnement des « gènes ». La génétique, que ce soit dans sa version forte (un gène détermine un caractère d’un être vivant) ou dans sa version adoucie appelée « épigénétique » (le déterminisme du gène est tempéré par d’autres facteurs dont l’environnement), est ainsi ébranlée dans son fondement : le désordre règne là où était censé régner un programme. Mais plutôt qu’abandonner cette théorie erronée, les biologistes pratiquent un double discours qui consiste à osciller en permanence entre les deux versions de la génétique (forte et adoucie), ce qui a pour effet de la transformer en une idéologie infaillible. Pour sortir de cette impasse, il est temps d’accepter la part anarchique du vivant, c’est-à-dire la variation aléatoire qui en est la propriété première et d’en tirer les conséquences. Il n’existe aucun ordre biologique intrinsèque qui déterminerait la vie. Les êtres vivants ne sont pas des sociétés centralisées de cellules obéissant aux ordres du génome ou de l’environnement, mais des communautés de cellules anarchistes, libres et actrices de leur destin, grâce au hasard qu’elles utilisent à leur profit. Ni gène, ni environnement, une nouvelle voie s’ouvre ici à la recherche biologique.
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