L’Europe se trouve aujourd’hui en position d’accusée, souvent par les Européens eux-mêmes, du fait de sa prétention à l’universalité, de sa supériorité proclamée et de son arrogance intellectuelle. Qu’elle n’ait pas toujours été fidèle à ses principes, lors de la colonisation des autres peuples, ne met pourtant pas en cause sa légitimité. La critique de l’Europe n’est en effet possible qu’à l’aide des normes juridiques et des principes éthiques qu’elle a diffusés auprès de tous les peuples pour connaître le monde plutôt que pour le juger.
Levinas n’avait donc pas tort de louer «la générosité même de la pensée occidentale qui, apercevant l’homme abstrait dans les hommes, a proclamé la valeur absolue de la personne et a englobé dans le respect qu’elle lui porte jusqu’aux cultures où ces personnes se tiennent et où elles s’expriment.» Il faut en prendre son parti : il n’y a pas plus d’égalité des cultures que de relativisme des valeurs. On ne saurait faire le procès de l’universel sans faire appel à la culture qui a donné cet universel en partage aux autres cultures.
Jean-François Mattéi, membre de l’Institut universitaire de France, est professeur émérite à l’Université de Nice et à l’Institut d’études politiques d’Aix-en-Provence. Parmi ses dernières publications, signalons les ouvrages suivants : Le Regard vide(Flammarion, 2007; prix Montyon de l’Académie Française en 2008), Le Sens de la démesure : Hurbis et Dikè (Sulliver, 2009), L’Identité de l’Europe (avec Chantal Delsol, PUF, 2010) et Albert Camus : Du refus au consentement (PUF, 2011).
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