mardi 2 janvier 2024

Bertrand Vaillant : L'amibe et la machine. Raymond Ruyer philosophe de la vie

 Ed. de la Sorbonne - Janvier 2024


« Le "je" de l'homme que je suis, centre d'activités sensées, peut-il s'isoler, se poser dans le vide, enfant trouvé métaphysique ? » Assurément non, pour le philosophe Raymond Ruyer (1902-1987) : la conscience humaine ne saurait être comprise que comme un cas particulier de l’activité commune à tous les vivants, voire à tout être véritable. Pour Ruyer, toutes les explications mécanistes de l’émergence de la conscience à partir d’une matière inerte ont échoué, il est donc temps de rompre tant avec le dualisme qu’avec le matérialisme mécaniste, pour repenser ensemble et radicalement la conscience, la vie et la matière. Au milieu du XXe siècle, il élabore ainsi une philosophie panpsychiste et finaliste qui fait de la conscience « l’étoffe même du monde ». S’appuyant sur une connaissance solide des sciences de son temps, de l’embryologie à la cybernétique, il s’efforce de montrer que cette version renouvelée du finalisme, inscrite dans la filiation de Leibniz, Schopenhauer, Bergson ou encore Whitehead, correspond bien mieux que le mécanisme à notre connaissance de la vie. Ce faisant, il développe une pensée originale, à l’audace métaphysique certaine, dont les intuitions donnent à voir ce que l’attention au vivant fait aux catégories classiques de la philosophie, et combien elle nous force à les refonder. Ce livre se penche sur les méthodes, les sources et les arguments de la théorie ruyérienne du vivant. Il s’efforce de mettre en évidence ses forces et ses faiblesses, voire ses dangers, quand elle prétend appliquer la « psycho-biologie » à des questions morales, sociales et politiques.

Sommaire

Introduction

Du matérialisme au panpsychisme

La rencontre de la biologie

Une philosophie du vivant

Une philosophie de la vie

Une philosophie antimoderne ?

Buts et plan de l'ouvrage

Chapitre 1. L’organisme hybride

Le statut hybride du vital

De très vieilles thèses et de nouvelles sciences

Le dédoublement des sciences

La vraie nature du vital

L’unité précaire des organismes

L’enchevêtrement causal

L’identité coloniale

La précarité et la mortalité

La conscience et sa machine

Le modèle de l’automate mixte

Mécanisme et vitalisme : l’héritage de Cournot

Chapitre 2. Le corps mécanique

Le corps-machine et ses difficultés

Formation et fonctionnement

L’héritage cartésien

Le sens caché de l’animal-machine

Le corps comme invention technique

Le programme de Cuénot et le corps comme « boîte à outils »

Vivre, c’est former ses outils

Réintégrer la technique à la nature

Chapitre 3. Une monadologie corrigée

La monadologie et le problème de la liaison

Ruyer disciple de Leibniz

Unité des corps et unité du monde

Le problème du corps chez Leibniz et le vinculum substantiale

Les faiblesses de la monadologie

L’individualité substantielle à l’épreuve du vivant

La demi-vérité du panpsychisme

L’étendue et le rythme

La monadologie corrigée : la conscience comme étendue vraie

Champ visuel et étendue consciente

Ruyer, Schopenhauer et la « grande voie naturelle de la philosophie »

La conscience doit exister dans l’espace

Chapitre 4. Le panpsychisme et la vie

La conscience est l’étoffe du monde

L’émergence impossible

La conscience tournée vers l’intérieur

La conscience comme activité autoformatrice

La conscience comme unité organique

L’autodifférenciation de l’embryon, un enjeu métaphysique

La conscience et l’habitude : Ruyer lecteur de Butler

Travail et finalité

Le double rôle de la conscience

Du problème de la liaison au problème de l’information

Ruyer et Merleau-Ponty : à la charnière de l’être et du sens

Chapitre 5. Face aux explications mécanistes, une compréhension sémantique du vivant

L’explication cybernétique

L’horizon nouveau de la cybernétique

Premier paradoxe : la nature de l’information

Second paradoxe : l’origine de l’information

Explication génétique et sélection naturelle

Génétique et épigenèse

L’ordre du monde vivant

Une biologie de la formation ?

La vie animale : évolution et comportement

Darwin et le rôle de la sélection naturelle

L’étude du comportement animal

Les causes et les signaux

Chapitre 6. Le néofinalisme et ses limites

Du thématisme au platonisme

Conscience-liaison et conscience-connaissance

Information et participation

Du thème à la mémoire de l’espèce

Néomatérialisme ou néofinalisme ?

« Un matérialisme qui ne dogmatise pas sur l’essence de la matière »

Du finalisme à la théologie naturelle

Philosophie et science : les dangers de la position de surplomb

La relation impensable

Perception et accès au milieu

De la finalité-harmonie à l’expressivité de la nature

Impossible écologie

Chapitre 7. Une politique de la vie

Forces vitales et mécanique sociale

Cosmologie et futurologie

Contre l’homme unidimensionnel

Les limites de la technique humaine

L’individu laborieux contre les utopies collectives

Abolir les « nuisances idéologiques » pour laisser place à la vie

Laisser apparaître la vie même

L’art d’être toujours content : bonheur gnostique, rêve et intimité

L’humanité en crise et la nécessité de durer

Un « vitalisme social » sous le signe de l’éternel féminin

De la conquête de la durée à l’eugénisme

De la philosophie du vivant à la politique de la vie

Conclusion

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