On trouvera ici une réflexion sur le paraître, que la philosophie a coutume, depuis Platon et jusqu’à Heidegger et acolytes, d’opposer à l’être, ou à ce qui existe (le réel). On s’étonnera que cet essai se recommande néanmoins, pour affirmer au contraire leur identité, du philosophe chez lequel la tradition a cru trouver pour la première fois une telle distinction : Parménide.
Mais il ne faut pas oublier que Platon appelait déjà son entreprise philosophique propre, dans le dialogue qu’il consacrait à Parménide, un « parricide » de ce dernier. Et parricide il y a bien, car il s’agit chez Platon, pour des questions essentiellement morales, d’accorder l’existence, outre à l’être, à l’autre, c’est-à-dire à ce qui n’existe pas. Paradoxalement, les interprètes actuels de Parménide, voulant retrouver celui-ci avant qu’il ne fût supprimé par le platonisme, n’ont pas su se contenter du lapidaire et inactuel « ce qui est est », et y ont prétendu voir une distinction entre l’existence et l’être, ou encore entre l’apparaître et la vérité.
Un parricide n’a donc vraisemblablement pas suffi à faire taire la sentence parménidienne qui invite à faire bon accueil à l’existence ; on en refait régulièrement le rituel. Cet essai propose d’aller à rebours.
Santiago Espinosa (Mexico, 1978) est philosophe et traducteur. Il est le lauréat 2015 de la Bourse Cioran du CNL. Encre Marine a déjà publié de lui L’Inexpressif musical (2013), Voir et entendre (2016) et Traité des apparences (2017) et L'Impensé (2019).
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