Les textes ici réunis correspondent à une importante période de maturation philosophique de l’auteur. Conscient du caractère crucial de la question de la chair pour la phénoménologie et perplexe devant la manière dont Merleau-Ponty l’élabore, Barbaras interroge le sens d’être du sujet : comment celui-ci peut-il être sous le même rapport, c’est-à-dire sans qu’il soit nécessaire d’introduire en lui la coupure de l’empirique et du transcendantal, appartenir au monde et s’en distinguer, être à la fois devant et au cœur des phénomènes ?
Avec Patocka, la critique radicale de l’intuitionnisme husserlien et du Dasein heideggerien le conduit à une détermination existentiale de l’existence et du corps propre comme mouvement. Mobilisant ses travaux sur la vie, irréductible à la fois aux lois de la matière et à la conscience, l’auteur comprend ce mouvement du sujet comme celui de la vie même et définit tout vivant comme un existant. Le mouvement vivant par lequel les sujets phénoménalisent le monde s’inscrit dans un mouvement plus originaire du monde lui-même, œuvre d’une archi-vie et renvoyant à une dynamique phénoménologique.
Arrimant la phénoménologie à une cosmologie et à une métaphysique, Barbaras la conduit à s’interroger sur ses propres limites. Demeure alors la question du passage de l’apparaître anonyme du monde à l’apparaître à une conscience, de la physis au sujet, de l’archi-vie du monde à la vie des vivants. Rompant ici avec Patocka et écartant l’écueil du naturalisme, l’auteur assume la scission entre la physis proto-phénoménalisante et notre existence phénoménalisante : le mouvement subjectif résulterait d’une rupture au sein de l’archi-mouvement du monde et relèverait d’un pur événement. Par cet archi- événement scissionnaire, le procès de la physis, se séparant de lui-même, donnerait naissance à un sujet dont le mouvement serait nécessairement aspiration à une réconciliation avec soi, tentative de rejoindre l’archi-vie originaire, bref, désir. Celui- ci repose la question de l’unité originaire de la chair. En effet, la dualité qui structure toute la démarche de Barbaras, entre mouvement et événement, apparaît comme l’avatar ultime de la dualité conscience/monde ou sujet/objet ; elle vient buter sur l’épreuve du corps comme sa limite interne.
Le volume est complété par une bibliographie exhaustive des travaux de Renaud Barbaras, élaborée par Mathias Goy, avec l’aide de Marco Barcaro, Mariana Larison et Petr Prášek.
SOMMAIRE
PRÉFACE par Renaud Barbaras
AVANT-PROPOS par Mathias Goy
ABRÉVIATIONS ET RÉFÉRENCES DES OUVRAGES CITÉS
Qu’est-ce que la philosophie ?
Première Partie
1. L’âme et le corps
2. Phénoménologie de la vie
3. Vers une ontologie de la vie
Deuxième Partie
4. Sauver d’une réification de la conscience. La tâche
de la phénoménologie
5. L’activité de la passivité
6. L’intimité au monde
7. L’événement de la finitude
Troisième Partie
8. Démarche phénoménologique
9. Auto-présentation
Quatrième Partie
10. Phénoménologie et poétique
11. L’écriture de la séparation
Cinquième Partie
1er Entretien. Autour d’Introduction à une phénoménologie de la vie
2e Entretien. Renaud Barbaras répond aux questions de F.-D. Sebbah
3e Entretien. La phénoménologie et le concept de vie
4e Entretien. Cinq questions
5e Entretien. Entretien avec Renaud Barbaras
ORIGINE DES TEXTES
BIBLIOGRAPHIE PRIMAIRE ET SECONDAIRE
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