" Le national-socialisme est un principe barbare ", écrit Martin Heidegger dans ses Cahiers noirs, ajoutant : " C'est ce qui lui est essentiel et sa possible grandeur. " Révolutionnaire radical, ayant vu et approuvé le caractère destructeur du nazisme, le recteur de Fribourg a réservé d'autres surprises dans ses journaux philosophiques, dans lesquels il évoque par exemple l'" auto-anéantissement du "juifˮ ". Alors que le philosophe est devenu un objet d'incompréhension et d'horreur, nombre de spécialistes en appellent désormais à l'histoire. C'est cette réhistoricisation que l'auteur a entreprise dans ce livre. Refusant la polémique, l'adoration et la détestation, il s'emploie à comprendre l'homme et le penseur, de l'intérieur et en son temps, par le biais de toutes les sources disponibles : cours, lettres, textes de circonstance, de même que les Cahiers noirs qui suscitent tant d'émoi. Excédant largement le III e Reich, le cheminement de Heidegger fut heurté : il commença par un catholicisme intransigeant, qui laissa la place, après la Première Guerre mondiale, à une volonté farouche de révolution philosophique, terreau dans lequel son nazisme vint jeter de profondes racines qui survécurent à l'effondrement du régime d'Adolf Hitler. De cette biographie se dégage un portrait fait d'ombres et de lumières : grand philosophe, maître, ami ou amant de juifs ou d'étrangers, Heidegger fut aussi un nationaliste antisémite, inquiet de l'" enjuivement " de son peuple et soucieux de son rôle historique prééminent.
Guillaume Payen, historien et philosophe de formation, chercheur associé au Centre Roland Mousnier de la Sorbonne où il enseigne, a soutenu une thèse sur Heidegger dans la période 1889-1933 et publié de nombreux articles.
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