ULM - Mai 2024
La dispute de l’ornement que nous ont rendue familière les travaux de l’historien de l’art Aloïs Riegl et le célèbre pamphlet d’Adolf Loos, tout comme les prises de positions des artistes du modernisme et du minimal art, a une longue histoire. Les Concepts préliminaires en vue d’une théorie des ornements de Karl Philip Moritz rédigés en 1793, constituent une étape décisive. Signé par l’un des tenants de la Klassik, héritier de Winckelmann et de Herder, dont l’influence sur Goethe est notoire, l’ouvrage étonne par son enquête empirique et sa pratique de la description. Une théorie des ornements et non de l’ornement se construit dans l’étude des motifs, la connaissance des productions qu’un long voyage en Italie et l’observation des demeures berlinoises ont procurées à l’auteur. Moritz montre que la pensée de l’ornement est une pièce maîtresse de la réflexion esthétique sur la beauté. À l’opposé de l’allégorie, les ornements sont des formes libres qui n’imitent rien, qui n’ont pas de signification. Ils dévoilent la dimension anthropologique du besoin d’art et contribuent à la promotion de l’imagination. Conçu dans le contexte de l’Académie des arts de Berlin, ce texte a un rôle éducatif; il remplit aussi une fonction politique, à l’heure d’une industrialisation croissante des arts appliqués autour de 1800.
Auteur incontournable des Lumières allemandes, Karl Philipp Moritz (1756-1793) est écrivain, grammairien, psychologue et théoricien de l’art. Il a marqué l’esthétique en tant que précurseur d’une théorie de l’autonomie de l’art.
Direction : Docteur en philosophie, Clara Pacquet enseigne l’histoire et la théorie de l’art à l’École supérieure d’art Pays basque.
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