Pendant trop longtemps, la philosophie nous a raconté une histoire déprimante. Il y aurait un Moi qui, à travers le langage et la pensée, construirait le monde, les autres moi et, si absurde que cela puisse paraître, le passé lui-même. Cette histoire est triste parce que cette position, qui se prétend révolutionnaire, est de fait profondément conservatrice : c’est la réaction pure, c’est la négation de tout événement. Elle nous enseigne que rien de nouveau ne pourra jamais nous frapper, au titre de menace ou de promesse, et cela parce que le monde est tout entier à l’intérieur de nous.
Avec un langage créatif et des arguments aussi ironiques que contraignants, Ferraris nous raconte une autre histoire. La réalité et la pensée qui la connaît proviennent du monde, à travers des processus et des explosions, des chocs, des interactions, des résistances et des altérités qui ne cessent de nous surprendre. Du Big Bang aux termites, du web à la responsabilité morale, ce que le monde nous donne (c’est-à-dire tout ce qui existe) émerge indépendamment du moi et de ses claustrophobies.
Maurizio Ferraris est professeur de philosophie à l’université de Turin. Éditorialiste pour La Repubblica, il est directeur de la Rivista di Estetica et co-directeur de Critique. Il a écrit plus de cinquante ouvrages, traduits en plusieurs langues, dont T’es où ? Ontologie du téléphone mobile (2005) et Mobilisation totale (2015).
Traduit de l’italien par Sabine Plaud
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