Accusé par un correspondant de considérer sa propre philosophie comme la
meilleure de toutes, Spinoza rectifie : il sait seulement qu’est vraie
celle qu’il comprend. Mais on ne trouvera chez lui ni réelle
thématisation ni véritable définition de l’idée de philosophie, pas plus
qu’un programme des connaissances comme s’appliquent à en dresser
Bacon, Descartes ou Hobbes. Cet ouvrage enquête alors sur la présence,
chez Spinoza, d’une conception précise voire singulière de l’idée de
philosophie. Il collecte les indices d’une telle idée conçue comme
praxis de distinction ou, selon l’expression Althusser, comme activité
de tracer des lignes de démarcation. Mais il établit encore que la
philosophie prend elle-même sens en ce geste, et seulement en ce geste,
c’est-à-dire par le biais de relations nécessaires avec ce qui a priori
n’est pas elle : le vulgaire, l’ignorant, le théologien, le souverain ou
même d’autres philosophes. L’idée de philosophie, en d’autres termes,
s’autoproduit dans un système de rencontres singulières. En analyser les
fruits permet alors de recomposer la nature de la «vraie philosophie» :
une pratique de production d’idées et de leur communication. Mais se
fait jour, en outre, comme un naturel philosophe, effort s’éprouvant
selon une réjouissance propre au «vrai philosophe», déjà sage en vertu
de son mouvement de se perfectionner et d’accroître sa puissance.
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