Étincelle de la philosophie du langage moderne, Lichtenberg fait, le
premier, apparaître que nous sommes toujours en train de parler déjà
quand nous nous mettons à raisonner sur le langage. Nous ne pouvons
sortir du langage avec le langage. La théorie ascétique et entièrement
descriptive de Wittgenstein constitue une mise en application
systématique de la maxime de Lichtenberg : « Toute notre philosophie est
rectification de l’usage linguistique. » Wittgenstein cherche à
appréhender ce qui, dans le langage, est seul susceptible de fonctionner
(d’avoir du sens ou une utilisation concrète) et ce qui ne l’est pas.
Le sujet n’est pas à proprement parler éliminé. Or si l’on se limite à
ce qui est seul possible et sensé dans l’utilisation du langage, les
problèmes posés par les prérogatives du sujet s’éteindraient
d’eux-mêmes. Lichtenberg, en revanche, parvient à relier la mise au
centre du sujet de l’expérience, caractéristique de son époque, à une
approche non pas affirmative, mais performative, expérimentale et
mouvante du sujet. Le dialogue entre ces deux auteurs si éloignés dans
le temps est susceptible d’éclairer d’une lumière nouvelle l’œuvre de
Wittgenstein, voire d’aider à mettre à distance les impasses et
dualismes coutumiers : holisme et individualisme, langage privé et
public, subjectif et intersubjectif, structure et rythme, identité et
éclatement, profondeur et surface, explication causale et explication
par l’usage ou par le jeu qui est déjà en cours...
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