Henri Roorda (1870-1925) est sans doute le meilleur humoriste qu’ait connu la Suisse romande ainsi que son meilleur moraliste.
Malgré une vénérable tradition en la matière, un moraliste n’est pas forcément ennuyeux. La méchanceté s’explique, la bonté se nuance... Ou – car tout comprendre n’est pas tout pardonner du premier coup – selon l’aveu d’ignorance brusque de Joseph de Maistre que Roorda aime citer: «J’ignore ce que peut être un scélérat, mais le coeur d’un honnête homme, c’est affreux.»
En marge de son activité d’enseignant et des nombreux textes qu’il consacra à la question pédagogique, il a publié pendant une dizaine d’années plus de 650 chroniques caustico-édifiantes dans les principaux journaux romands. Parmi celles qui n’ont toujours pas été réimprimées jusqu’ici, cette édition en propose une centaine, donnant autant de points de vue sur l’actualité d’alors que sur l’humanité éternelle (entendez: celle qui s’améliore si lentement qu’elle n’a pas changé depuis qu’on est en âge de l’observer). Il y traite, pêle-mêle, de l’idiotie de 1914-1918 et de l’hypocrisie des moralisateurs durant et après le conflit ; des savants que leur spécialité rend myopes au quotidien ; de la langue de bois politicarde ou marchande et des vanités allant avec ; des raidissements des sentiments d’appartenances, allant des micro-nationalismes au théories mégalo-complotistes ; et bien d’autres de nos travers.
Né le 30 novembre 1870 à Bruxelles, Henri Roorda van Eysinga voit le jour au sein d’une famille ouverte aux idées révolutionnaires et anticolonialistes. En 1872, la famille Roorda déménage dans le canton de Vaud, où le jeune Henri fréquentera le géographe anarchiste Élisée Reclus. En 1892, il obtient sa license en mathématiques à l’Université de Lausanne et débute une carrière d’enseignant dans un collège pour jeunes filles. Le nouvel instituteur s’interroge sur l’éducation inculquée aux élèves en constatant l’échec de l’enseignement traditionnel, il s’applique à créer de nouvelles méthodes pédagogiques libertaires, notamment inspirées par l’Émile de Jean-Jacques Rousseau. Le 7 novembre 1925, Henri Roorda met fin à ses jours. À titre posthume sera publié son dernier texte, Mon suicide (Allia, 2017).
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